samedi 13 mars 2021

Controverses éthiques, controverses scientifiques

Controverses éthiques, controverses scientifiques

Appel à contributions


Numéro spécial du Journal international de bioéthique

La ligne éditoriale
Créé en 1990 par le Pr L. Roche (médecine légale) et M. Ch. Byk (magistrat, spécialiste de droit
international), le Journal International de Bioéthique (éditions Eska) est une revue trimestrielle bilingue
consacrée à une approche pluridisciplinaire et internationale des rapports sciences, éthique et société.

Elle constitue un forum de réflexion et d’analyse des questions liées au mouvement bioéthique qui s’est développé depuis les années 1980. Elle s’efforce de valoriser les travaux académiques dans une
perspective d’élaboration des politiques scientifiques. Elle met particulièrement l’accent sur les aspects géo-culturels et de mondialisation des problèmes techno-scientifiques.

Les articles soumis au JIB ne doivent avoir été ni publiés, ni simultanément soumis ou déjà acceptés
pour publication ailleurs. Le fait de soumettre un article à la rédaction vaut à la fois pour la publication
papier et électronique de la revue, notamment via le portail www.cairn.info.
Les propositions d’articles sont anonymisées et lues par deux référents.


Argumentaire du numéro thématique
La connaissance apportée par la science a pour propriété première la stabilité. C’est ainsi que Socrate
distingue la science de l’opinion dans le Ménon (98a). Les opinions sont changeantes selon les moeurs,
les époques, les personnes, voire les humeurs du moment. D’une connaissance, il semble qu’il n’y ait
pas lieu de discuter. Cependant la science n’apparait pas tel le monolithe de S. Kubrick ; elle a une

histoire, des conditions sociales, économiques et politiques d’apparition. Aristote déjà faisait dépendre

l’apparition de la géométrie de la technique de l’arpentage, technique nécessaire pour retrouver les
limites exactes des terrains engloutis par les inondations du Nil. Ainsi la géométrie naît de la contestation sur l’appropriation d’une source de revenus, les terrains cultivés. Selon cette origine, dont la fonction est plus allégorique qu’elle n’est historique, la connaissance scientifique est issue de la controverse il ne s’agit pas seulement de dire le vrai ; il s’agit de mettre fin à des litiges. Il en est de même quand Archimède propose de peser la couronne du roi Hiéron, il s’agit de trancher une affaire : l’or confié à l’orfèvre a-t-il été intégralement fondu pour faire ce symbole du pouvoir (Vitruve, De l’architecture, IX) ? Ces deux exemples montrent que la connaissance scientifique s’établit et que, pour cela, elle a une histoire, ce milieu des événements. Précisément, et c’est le deuxième point, toute proposition nouvelle de connaissance qui veut s’établir et parce qu’elle se présente comme immuable sous une forme d’éternité, déclenche une controverse : vouloir dire le vrai, c’est vouloir s’assurer un pouvoir. Les propositions nouvelles de Copernic et de Galilée en astronomie, les controverses sur l’origine du vivant entre Pouchet et Pasteur, les siècles de contestation sur la nature de la lumière en physique, la présence ou l’absence d’un cinquième élément, l’éther, mise à mal par Einstein, la concurrence des tables astronomiques de Kepler avec celles des épigones de Ptolémée, montrent que la connaissance scientifique en tant qu’elle est un discours de vérité et, de ce fait, de pouvoir, est source de controverse.
A l’opposé, l’éthique semble l’arène de tous les débats. Il est admis qu’en éthique il n’est rien qui
n’ait été défendu. Les stoïciens font de la sagesse l’acceptation volontaire d’une nature qui est un destin
tandis que les épicuriens ne reconnaissent rien d’autre que le hasard. Vivre selon la nature qui semble le
précepte commun aux écoles post-socratiques1 n’a pas le même sens pour un Cynique, pour un Stoïcien, pour un épicurien. La moralité d’une action tient-elle à la rectitude du vouloir, comme le disent les philosophes déontologues, ou tient-elle aux conséquences avantageuses pour le plus grand nombre, comme le dit l’utilitarisme ? Cependant, un point semble partagé entre toutes les conceptions éthiques : il s’agit d’atteindre et de réaliser une vie bonne et désirable. La controverse semble se tarir avec la reconnaissance d’un seul et même souverain bien dans l’existence humaine. Nul ne souhaite pour soi et pour les autres une vie de souffrances en tant que telle et pour elle-même.
Plusieurs aspects peuvent être envisagés. En quoi les controverses scientifiques sont-elles aussi des
controverses éthiques ? La contestation de la proposition darwinienne engage avec elle une discussion
sur la moralité de l’homme, voire sur la moralité des espèces animales. La recherche du vrai, au sens de
ce qui est établi par démonstration ou par vérification expérimentale ou par observations répétées et
corroborées, est-elle une recherche morale au sens où elle contribuerait à la réalisation d’une vie bonne
et désirable ? Qu’y a-t-il d’éthique dans la controverse scientifique ? – son principe même qui voit dans
la confrontation des arguments la recherche d’un accord obtenu rationnellement ? – son déroulement
qui doit suivre les règles de transparence et de loyauté afin que tous les arguments soient entendus ? –
sa finalité, qui serait celle de la contribution à une vie bonne et désirable ?
Inversement, en quoi les controverses éthiques sont-elles aussi des controverses scientifiques ? Fautil
renoncer à un accord scientifiquement établi dans les débats sur ce qui est préférable et désirable quand
il est question du commencement ou de la fin de vie ? Les controverses éthiques peuvent-elles être
éteintes par des connaissances scientifiquement établies ?


Les axes de publication
Les textes proposés pourront concerner des moments de crise dans l’histoire, passée ou contemporaine, de la constitution des connaissances scientifiques.


Longueur des contributions
La proposition d’article doit être dactylographiée en double interligne (en Times new roman 12).
Pour un article thématique, le nombre de mots doit être compris (figures, tableaux et bibliographie
inclus) entre un minimum de 5000 (8-9 pages) et un maximum de 7000. Les pages sont numérotées
consécutivement sur l’ensemble du texte.
Les textes sont à envoyer à :
sergeboarini@gmail.com
Merci de préciser dans l’en-tête du courrier électronique le titre de la contribution

 

1 V. BROCHARD, « La morale ancienne et la morale moderne », Revue Philosophique de la France et de l’Étranger, vol. 51, Presses Universitaires de France, 1901, p. 5-6.

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