mardi 26 novembre 2019

Produire la santé et la maladie à l'étable

Produire la santé et la maladie à l'étable, 1930-1980

Appel à communications


Workshop
(Zürich, avril 2020)

Organisateurs : Beat Bächi (Institut für biomedizinische Ethik und Medizingeschichte, Universität Zürich), Maria Böhmer (Institut für biomedizinische Ethik und Medizingeschichte, Universität Zürich), Frédéric Vagneron (Centre Alexandre-Koyré, EHESS, Paris)

Entre les années 1930 et les années 1980, un changement significatif s’est opéré dans les méthodes de production agricole. L' « industrialisation des organismes » a changé la façon dont les gens travaillent et traitent le bétail (Schrepfer et Cranton 2003). Au moins en Europe, l'objectif de politiques économiques visant à accroître les performances et la production s'est accompagné d'une spécialisation croissante en élevage et d'une professionnalisation accélérée des acteurs concernés. Un domaine important dans lequel cette spécialisation s'est reflétée est l'incidence des maladies dans l'étable.

Alors que des travaux de recherche les plus récents ont porté sur les conséquences de l'intensification de l'agriculture et de l'élevage sur la sécurité alimentaire, sur les comportements de consommation et l’appréciation des risques pour les sociétés, nous voulons attirer l'attention sur les pratiques concrètes et les matérialités qui ont émergé autour de la « santé animale ». Ce workshop vise donc à interroger comment la santé et la maladie ont été « produites » dans l'étable entre des années 1930 et les années 1980.

Nous postulons que non seulement les vétérinaires, les éleveurs et les animaux eux-mêmes ont été impliqués, mais aussi une multitude d'autres acteurs, tels que : les producteurs d'aliments pour animaux et les conseillers agricoles, les agronomes et zootechniciens, les instituts de recherche privés, les organisations coopératives, les instituts et laboratoires de recherche gouvernementaux, l’industrie pharmaceutique, et des acteurs supranationaux. Tous sont, à divers titres, engagés dans la « co-production » de la santé animale à l'étable (Woods 2019). Plus que les maladies animales épizootiques historiques « classiques », les nouvelles maladies dites « de production » (Payne 1971) ont nécessité une collaboration étroite de nombreux groupes d'experts. Quels intérêts ont poursuivis ces différents acteurs ? Qui sont les acteurs de la prescription de nouvelles substances et de « solutions » adaptées à l’objectif d’accroitre les rendements ? Comment ces différents acteurs ont-ils essayé de prévenir ou de guérir ces maladies aux manifestations dissemblables dans les populations animales ? Où se trouvaient les collaborations et les conflits entre divers intérêts professionnels, économiques, sanitaires ou politiques ? Comment les catégories d’animaux « naturels » et « sains » ont émergé et guidé l’action ?

Nous voudrions attirer particulièrement l'attention sur l'importance du recours aux substances médicales à l'étable. On peut supposer que l'augmentation rapide de l'utilisation des médicaments après 1950 n'a pas seulement servi à des fins thérapeutiques, mais qu'elle a également apporté une réponse à divers problèmes de l'élevage (à commencer par la concentration des populations dans des environnements artificiels) consécutifs à l'intensification et la spécialisation de l'agriculture. Cependant, nous nous intéressons également aux pratiques et aux stratégies de gestion des animaux sains et malades qui ne relèvent pas de cette influence croissante des substances pharmaceutiques, mais qui ont néanmoins été transformées pour s’adapter aux changements structurels de l'élevage. Enfin et surtout, nous nous demandons comment, et dans quels contextes, la résistance à l'objectif global d'amélioration de la performance s’est manifestée - et le rôle joué par les substances médicales dans ce but – et dans quels milieux des concepts et des pratiques alternatifs ont émergé.

Nous invitons les chercheurs intéressés à proposer, grâce à des études de cas originales et documentées, des communications concernant, entre autres, les aspects suivants :
- L'utilisation des médicaments dans l'étable et le rôle de l'industrie pharmaceutique
- Les animaux d'élevage comme que fournisseurs de substances pour la production pharmaceutique
- Les relations, conflictuelles ou non, entre vétérinaires, agronomes et zootechniciens dans le domaine de la santé animale.
- Le point de vue et les pratiques des agriculteurs et leurs intérêts pour l'utilisation des produits pharmaceutiques
- Le travail des instituts de recherche vétérinaire et agricole (privés/publics) en santé animale
- La définition des maladies de production et de la « santé animale » comme nouveaux enjeux cruciaux
- L'industrie de l'alimentation animale et l'alimentation animale comme acteur et véhicule de l’introduction du médicament dans l’étable
- Les interactions entre la médecine vétérinaire et la médecine humaine, et entre le marché des substances pharmaceutiques (préventives ou thérapeutiques) en santé animale et humaine
- Les conséquences sanitaires de l’intensification agricoles pour les travailleurs agricoles
Sur toutes ces thématiques, les présentations offrant des réflexions critiques sur les fonds d'archives, les sources et les différentes approches méthodologiques pour traiter de ces questions sont les bienvenues.

Ce Workshop aura lieu à Zurich la dernière semaine d'avril 2020.

Un bref résumé de 400 mots (en allemand, français ou anglais) présentant la question de recherche, l'approche et les sources mobilisées est attendu pour fin décembre 2019.

Contact pour l’envoi des résumés : : beat.bächi@uzh.ch

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