Le troisième combattant. L’action humanitaire durant la Guerre civile espagnole et l’exil républicain
Appel à communications
Colloque organisé à l’occasion du 80ème anniversaire du début de la Guerre civile espagnole
27-28 octobre 2016
Auditoire de la Foundation Louis Jeantet
Genève
27-28 octobre 2016
Auditoire de la Foundation Louis Jeantet
Genève
Organisateurs :
Sébastien Farré (Maison de l’histoire)
Dolores Martín Moruno (iEH2)
En 1947, le médecin suisse Marcel Junod (1904-1961) publie Le Troisième combattant, intitulé dans sa traduction anglaise Warriors Without Weapons (1951). Ce texte expose son expérience de délégué du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) depuis les bombardements au gaz moutarde contre la population éthiopienne lors de l'invasion italienne (1935-1936) jusqu’aux conséquences tragiques du lancement de la bombe atomique à Hiroshima au mois d’août 1945 en passant par la Guerre civile espagnole (1936-1939). Pour Junod, cette notion de troisième combattant évoque les acteurs humanitaires. Ni « caballeros » ni « camaradas », ceux-ci ne sont engagés en faveur d’aucune partie belligérante, mais ils mènent un combat afin de porter secours aux victimes de la guerre et de « montrer la réalité de leur souffrance » quelles que soient leur nationalité ou leurs convictions idéologiques (Junod, 1989: 369). Néanmoins, dans son récit, Junod omet d’évoquer que toute intervention humanitaire - que ce soit le don de nourriture, la protection des personnes menacées et l’offre de soins de santé - signifie également une forme de participation à la guerre, quoiqu’en pense les humanitaires.
En prenant comme point de départ le texte de Junod, ce colloque propose de repenser la Guerre civile espagnole et l’exil qui l’a suivi comme un moment significatif de la cristallisation de l’humanitaire moderne. En commémorant le 80ème anniversaire du déclenchement de la guerre d’Espagne, l'objectif principal de ce colloque est, par conséquent, d'examiner la Guerre civile espagnole à partir d'une figure marginalisée dans l'historiographie de ce conflit, soit celle du « troisième combattant ». Cette proposition s’inscrit dans le prolongement des travaux de Tom Buchanan (1991), Angela Jackson (2002), Linda Palfreeman (2012, 2014 et 2015), Álvar Martínez Vidal (2013), Gabriel Pretus (2013), Sébastien Farré (2014) et Geneviève Dreyfus-Armand (2015). Au-delà de l'histoire façonnée par les organisations humanitaires, l'histoire des actions de secours de ces « troisièmes combattants » doit être replacée dans un tissu social et culturel plus large afin de déconstruire leur caractère héroïque et de comprendre leur impact politique au cours de la Guerre civile en Espagne.
Les très nombreuses organisations humanitaires mobilisées pendant le conflit, actives en parallèle auprès des deux parties en conflit ou dédiées uniquement à l’assistance en faveur du camp insurgé ou
du camp républicain, traduisent l’importance du mouvement de solidarité durant la Guerre civile espagnole. Son caractère inédit est lié au développement du photojournalisme moderne, mais aussi à la politique officielle de non-intervention des principaux Etats, qui s’efforcent de limiter la participation des sociétés civiles, mobilisées pour la cause espagnole, à des interventions sur le terrain humanitaire.
Le CICR, les quakers britanniques (Friends Service Committee) ou leurs coreligionnaires des États-Unis (American Friends Service Committee), le Save the Children Fund, l'Union internationale de Secours aux Enfants et de la Schweizerische Arbeitsgemeinschaft für Kinder Spanien, mieux connu en Espagne comme Ayuda Suiza, furent parmi les principales institutions engagées au nom de la neutralité sur le terrain humanitaire durant la Guerre civile espagnole. En parallèle, d'autres organisations internationales menèrent des campagnes de collectes de fonds en faveur de la cause républicaine, tels que le Secours Rouge International, la Solidarité Internationale Antifasciste ou le Comité International de coordination et d’information pour l’aide à l’Espagne républicaine. De même, certaines organisations rassemblèrent des fonds pour alléger les souffrances de l'Espagne nationaliste, à l’exemple de l’Universe Medical Aid Fund britannique ou du groupe belge « Action et Civilisation ». Il faut évoquer également le rôle essentiel de nombreuses organisations nationales espagnoles telles que la Croix-Rouge espagnole, la Sección Femenina de Pilar Primo de Rivera ou celles proches des syndicats comme le mouvement procommuniste Agrupación de Mujeres Antifascistas ou encore Mujeres Libres, proche des cercles anarchistes.
Avec l’intention d'aborder la complexité des interventions humanitaires menées durant la guerre civile espagnole, et pendant l'exil républicain, nous invitons tous les chercheurs intéressés à participer à ce colloque à présenter une proposition originale à partir de l'une des questions suivantes :
Sébastien Farré (Maison de l’histoire)
Dolores Martín Moruno (iEH2)
En 1947, le médecin suisse Marcel Junod (1904-1961) publie Le Troisième combattant, intitulé dans sa traduction anglaise Warriors Without Weapons (1951). Ce texte expose son expérience de délégué du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) depuis les bombardements au gaz moutarde contre la population éthiopienne lors de l'invasion italienne (1935-1936) jusqu’aux conséquences tragiques du lancement de la bombe atomique à Hiroshima au mois d’août 1945 en passant par la Guerre civile espagnole (1936-1939). Pour Junod, cette notion de troisième combattant évoque les acteurs humanitaires. Ni « caballeros » ni « camaradas », ceux-ci ne sont engagés en faveur d’aucune partie belligérante, mais ils mènent un combat afin de porter secours aux victimes de la guerre et de « montrer la réalité de leur souffrance » quelles que soient leur nationalité ou leurs convictions idéologiques (Junod, 1989: 369). Néanmoins, dans son récit, Junod omet d’évoquer que toute intervention humanitaire - que ce soit le don de nourriture, la protection des personnes menacées et l’offre de soins de santé - signifie également une forme de participation à la guerre, quoiqu’en pense les humanitaires.
En prenant comme point de départ le texte de Junod, ce colloque propose de repenser la Guerre civile espagnole et l’exil qui l’a suivi comme un moment significatif de la cristallisation de l’humanitaire moderne. En commémorant le 80ème anniversaire du déclenchement de la guerre d’Espagne, l'objectif principal de ce colloque est, par conséquent, d'examiner la Guerre civile espagnole à partir d'une figure marginalisée dans l'historiographie de ce conflit, soit celle du « troisième combattant ». Cette proposition s’inscrit dans le prolongement des travaux de Tom Buchanan (1991), Angela Jackson (2002), Linda Palfreeman (2012, 2014 et 2015), Álvar Martínez Vidal (2013), Gabriel Pretus (2013), Sébastien Farré (2014) et Geneviève Dreyfus-Armand (2015). Au-delà de l'histoire façonnée par les organisations humanitaires, l'histoire des actions de secours de ces « troisièmes combattants » doit être replacée dans un tissu social et culturel plus large afin de déconstruire leur caractère héroïque et de comprendre leur impact politique au cours de la Guerre civile en Espagne.
Les très nombreuses organisations humanitaires mobilisées pendant le conflit, actives en parallèle auprès des deux parties en conflit ou dédiées uniquement à l’assistance en faveur du camp insurgé ou
du camp républicain, traduisent l’importance du mouvement de solidarité durant la Guerre civile espagnole. Son caractère inédit est lié au développement du photojournalisme moderne, mais aussi à la politique officielle de non-intervention des principaux Etats, qui s’efforcent de limiter la participation des sociétés civiles, mobilisées pour la cause espagnole, à des interventions sur le terrain humanitaire.
Le CICR, les quakers britanniques (Friends Service Committee) ou leurs coreligionnaires des États-Unis (American Friends Service Committee), le Save the Children Fund, l'Union internationale de Secours aux Enfants et de la Schweizerische Arbeitsgemeinschaft für Kinder Spanien, mieux connu en Espagne comme Ayuda Suiza, furent parmi les principales institutions engagées au nom de la neutralité sur le terrain humanitaire durant la Guerre civile espagnole. En parallèle, d'autres organisations internationales menèrent des campagnes de collectes de fonds en faveur de la cause républicaine, tels que le Secours Rouge International, la Solidarité Internationale Antifasciste ou le Comité International de coordination et d’information pour l’aide à l’Espagne républicaine. De même, certaines organisations rassemblèrent des fonds pour alléger les souffrances de l'Espagne nationaliste, à l’exemple de l’Universe Medical Aid Fund britannique ou du groupe belge « Action et Civilisation ». Il faut évoquer également le rôle essentiel de nombreuses organisations nationales espagnoles telles que la Croix-Rouge espagnole, la Sección Femenina de Pilar Primo de Rivera ou celles proches des syndicats comme le mouvement procommuniste Agrupación de Mujeres Antifascistas ou encore Mujeres Libres, proche des cercles anarchistes.
Avec l’intention d'aborder la complexité des interventions humanitaires menées durant la guerre civile espagnole, et pendant l'exil républicain, nous invitons tous les chercheurs intéressés à participer à ce colloque à présenter une proposition originale à partir de l'une des questions suivantes :
• Les acteurs présents sur le terrain humanitaire. Parmi ces « troisièmes combattants », nous pensons notamment à des militantes comme l’italo-américaine Tina Modotti (Secours Rouge International) ou des infirmières à l’exemple de la britannique pro-nationaliste Priscilla Scott-Ellis, des directeurs d’établissements de soins comme Elisabeth Eidenbenz à Elne (Croix-Rouge suisse Secours aux enfants), des chirurgiens comme Norman Bethune (Comité canadien pour l'aide à la démocratie espagnole) ou Joseph Eastman Sheehan qui a travaillé à l'hôpital militaire du général Mola à Saint-Sébastien, ainsi que des délégués comme Rodolfo Olgiati (Ayuda Suiza) ou Frédérique Small (UISE).
Nous pouvons appréhender leurs expériences du conflit à travers leurs témoignages écrits - revues, cahiers, rapports - administratifs ou cliniques, qui constituent des récits "humanitaires" (Laqueur, 1989) mais aussi par leurs nombreux dessins et photographies. Nous encourageons une analyse de ces
deux types de documents - écrits et visuels - mettant l'accent sur le rôle joué par les émotions, telles que la compassion, la pitié ou l'empathie, dans la constitution de l'ethos humanitaire de ces acteurs au
cours de la guerre civile en Espagne.
• Les pratiques humanitaires qui caractérisent le secours humanitaire pendant la guerre civile espagnole et l'exil républicain, comme l’offre de lait pour les enfants dans des cantines, la chirurgie de guerre, ainsi que la distribution d’aliments parmi les réfugiés des camps d'internement basés dans la Sud de la France (Rivesaltes, Gurs ou Argelès sur Mer). Une attention particulière sera accordée à ces pratiques comprises sous la désignation contemporaine de « médecine humanitaire », issue des expériences et des connaissances développées par diverses disciplines (la chirurgie de guerre, la nutrition ou l’épidémiologie, Brauman, 2009). La Guerre civile espagnole a été non seulement un laboratoire dans lequel de nouvelles technologies ont été mises en oeuvre, telles que les unités de transfusion sanguine mobiles (Coni, 2008), mais aussi le terrain de développement de campagnes sanitaires à l’exemple de celles financées par la Fondation Rockefeller dont l’objet était d’assurer une
assistance médicale aux troupes franquistes en provenance du Maroc (maladies vénériennes et paludisme, Barona et Perdiguero-Gil, 2008).
• Les espaces dans lesquels les opérations humanitaires se sont déroulées. Ceux-ci ont été dessinés par les frontières changeantes entre le territoire républicain et celui de l’Espagne nationaliste durant le cours de la guerre ; ils ont été également façonnés par les routes suivies par les réfugiés à l'intérieur du pays ainsi qu’à l'extérieur, au Roussillon français, au Mexique ou en URSS. Les villages bombardés, les tranchées, les camps de prisonniers ou de réfugiés, les ambulances, les hôpitaux, les cantines et les colonies pour enfants constituent des « espaces humanitaires » qui nous permettent de réfléchir à la notion de neutralité en l'intégrant dans la matérialité des interventions humanitaires sur le terrain, mais aussi dans le contexte social et politique de l’Espagne ainsi que dans l'histoire de la politique étrangère menée par les grandes puissances mondiales au cours de la guerre civile.
Toutes les personnes intéressées à présenter une communication lors de ce colloque sont invitées à
envoyer une proposition de 300 mots et une brève biographie à l’adresse suivante :
colloque-guerracivil@unige.ch avant le 15 mai 2016. Les propositions peuvent être transmises en
français, en anglais ou en espagnol.
envoyer une proposition de 300 mots et une brève biographie à l’adresse suivante :
colloque-guerracivil@unige.ch avant le 15 mai 2016. Les propositions peuvent être transmises en
français, en anglais ou en espagnol.
COMITE SCIENTIFIQUE
Jon Arrizabalaga (CSIC- CSIC-Institución Milà i Fontanals, Barcelona)
Vincent Barras (Institut universitaire d’histoire de la medicine et de la santé publique, Lausanne)
Tom Buchanan (Oxford University)
Geneviève Dreyfus-Armand (Centre d’études et de recherches sur les migrations ibériques, Paris)
Jean-François Fayet (Université de Fribourg, EHESS, Paris)
Irène Herrmann (Université de Genève)
Álvar Martínez Vidal (Universitat de València)
Francesca Piana (Bousière FNS affiliée au Birbeck College, Londres)
Javier Ordóñez (Universidad Autónoma de Madrid)
Davide Rodogno (International Graduate Institute, Genève)
Bertrand Taithe (University of Manchester)
https://conferencegeneva.wordpress.com
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