Appel à communications
Château des Lauriers, musée national de l'Assurance maladie
10, route de Carbon Blanc
10, route de Carbon Blanc
Lormont, France (33)
Il s’agit ici d’éclairer la manière dont a été, ou est encore, théorisée la protection sociale, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. Même si la réflexion en la matière ne se généralise et ne se structure vraiment qu’à la Révolution française, toutes les époques contiennent en effet des éléments de réflexion. On l’aura compris : la journée d’études s’attachera aux grandes figures de cette histoire, comme aux auteurs et aux théories oubliés. Quels sont les différents modèles et idées ayant été proposés ?
« L’histoire de la protection sociale est une histoire de tensions et de conflits, où les rivalités les plus vives se manifestent pour le contrôle d’un secteur qui apporte à ceux qui s’y consacrent prestige et autorité - qui sont les marches du pouvoir », Henri Hatzfeld, 12 janvier 1989.
Champ de luttes et objet de pouvoir, la protection sociale s’est construite de manière empirique, par une multitude d’initiatives privées isolées, reprises et généralisées dans un second temps par l’État : ce processus est désormais bien connu. Il nous semble en revanche opportun de s’attarder sur la question de la théorisation de ces différentes initiatives et sur l’émergence d’une pensée de la protection sociale, qui est une autre forme de ce pouvoir dont parle Henri Hatzfeld. Celui-ci, dans son ouvrage classique Du paupérisme à la Sécurité sociale (1850-1940). Essai sur les origines de la Sécurité sociale en France, a dégagé les grands fondements idéologiques de la protection sociale pour l’histoire contemporaine. Néanmoins, ce cadre général fondateur a vocation à être approfondi et nuancé.
De fait, l’histoire classique de la pensée en matière de protection sociale envisage souvent les ordonnances de 1945 créant la Sécurité sociale comme un modèle indépassable et comme point d’arrivée obligé. C’est sur ce déterminisme que la présente journée d’études voudrait revenir. Une telle conclusion était-elle inévitable ? Il s’agira alors de proposer quelques éléments de réponse en étudiant la façon dont la protection sociale a été pensée à travers l’histoire, ainsi qu’à la façon dont elle est pensée aujourd’hui, à l’heure de la crise que subit le modèle de la Sécurité sociale.
Il s’agit ici d’éclairer la manière dont a été, ou est encore, théorisée la protection sociale, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. Même si la réflexion en la matière ne se généralise et ne se structure vraiment qu’à la Révolution française, toutes les époques contiennent en effet des éléments de réflexion. On l’aura compris : la journée d’études s’attachera aux grandes figures de cette histoire, comme aux auteurs et aux théories oubliés. Quels sont les différents modèles et idées ayant été proposés ?
Une partie du colloque pourra tout d’abord utilement analyser la pensée pré-révolutionnaire en la matière. Quand trouve t-on, historiquement, les premières tentatives de réflexion sur les risques de l’existence ? Peut-on remonter au-delà des dernières décennies de l’Ancien Régime ? Autrement dit, la question a t-elle, au moins en partie, été théorisée ou pratiquait-on simplement « spontanément » l’assistance et la charité ? Quelle est, en la matière, la pensée de l’Église, par exemple, des pouvoirs municipaux ou du pouvoir royal ? Quant aux juristes de l’Ancien Droit, ont-ils participé à la réflexion ou cette question leur échappe t-elle encore ? Les dictionnaires et répertoires d’Ancien Régime, par exemple, font-il état de telles préoccupations ?
Quoi qu’il en soit, une partie du colloque devra également s’intéresser à la très riche réflexion révolutionnaire en matière de protection sociale. La Révolution française marque en effet un tournant crucial, l’assistance étant déclarée devoir sacré de la Nation par le Comité de mendicité, dont la réflexion pourra également être étudiée par le menu, par le biais de ses procès-verbaux. De manière plus large, pourront être mobilisées les importantes ressources des Archives parlementaires, excellents marqueurs des idées révolutionnaires. Les sous-bassements intellectuels de la Révolution, et notamment la philosophie des Lumières, pourront de même faire l’objet d’analyses. Les philosophes des Lumières, dans un contexte de montée en puissance de la puissance publique, ont réfléchi sur le sujet. Traité et brochures sur l’indigence se multiplient à la fin des Temps Modernes. Le sujet est également traité par L’Encyclopédie. Ces différents discours auront vocation à être passés au crible de l’analyse. De même, l’on pourrait utilement solliciter les différentes idées contenues dans les cahiers de doléances des États Généraux.
Au XIXe siècle, il semblerait que ce soit les acteurs de la sphère privée qui aient les premiers mené une réflexion sur la protection sociale : patronat, syndicats, membres d’associations diverses (Société de Saint-Vincent de Paul, par exemple), philanthropes, penseurs de l’Eglise ou encore les ouvriers eux-mêmes. La réflexion se mène d’ailleurs souvent au niveau local : qu’en est-il de la réflexion des différentes assemblées locales, telles que les conseils municipaux ou généraux ? Cette pensée protéiforme, émanant de plusieurs sphères, a ensuite été captée par les pouvoirs publics, qui se sont toujours intéressés à la protection sociale, même si leur action a été plus lente à se mettre en place. À ce titre, les discours des parlementaires, par exemple, pourront utilement faire l’objet d’études, de même que les programmes électoraux des partis politiques. Bref, il s’agira de se demander si, au XIXe siècle, la protection sociale a été théorisée avant qu’elle n’émerge comme discipline universitaire à part entière au XXe siècle. Quelles sont les théories et les modèles ayant été avancés, par les courants progressistes comme conservateurs ? Comment les penseurs mobilisent-ils les différentes disciplines à l’appui de leurs théories (histoire, droit comparé, sociologie, ou statistique) ? Sur ce point, un éclairage comparatif serait particulièrement bienvenu.
La journée d’études s’attachera également à mettre en lumière les lieux et institutions au sein desquels s’élabore cette réflexion. Une géographie de la pensée en matière de protection sociale pourrait ainsi être utilement esquissée. On sait que dans les facultés de droit, la forme du manuel implique la reconnaissance académique d’une nouvelle discipline et la formulation de ses contours. Quand le volet « protection sociale » se détache t-il des manuels de droit du travail, par exemple, pour devenir une matière autonome ? Comment délimite t-on ses contours ? Cette autonomisation est vraisemblablement liée à l’apparition d’un enseignement universitaire distinct. Les modalités de cette apparition devront être mises en lumière, ainsi que le contenu des premiers cours dispensés, et le profil des professeurs ayant investi le champ, dans une optique de socio-histoire intellectuelle. Avant même cette institutionnalisation au sein des facultés de droit, la protection sociale comme champ autonome commence t-elle à apparaître dans les revues ou dans les congrès ? On sait que ces derniers sont souvent l’expression d’un champ disciplinaire en pleine construction intellectuelle (controverses, comptes rendus d’ouvrages etc.). Il s’agit par conséquent d’interroger la fabrique intellectuelle, notamment sémantique, de la catégorie « protection sociale ».
Enfin, dans une optique prospective, il serait opportun que les juristes fassent un point sur la production intellectuelle actuelle (différentes tendances des manuels ou des revues, par exemple), pour expliquer les inflexions éventuelles de la pensée contemporaine en la matière. À l’heure de la crise de la Sécurité sociale, vers quelles solutions s’achemine t-on ? Les acteurs sociaux (syndicalistes, praticiens de la Sécurité sociale) pourront également apporter d’utiles éléments de réflexion prospective.
Modalités de soumission
Langue de travail : Français
Les projets de communication (titre de la contribution, présentation de la communication ne devant pas excéder une page avec ses sources, un court CV) doivent être envoyés à Laetitia Guerlain : laetitia.guerlain@u-bordeaux.fr et Emmanuelle Saujeon-Roque : cahss@wanadoo.fr
avant le 10 novembre 2014.
Le résultat de l’évaluation des propositions sera connu à partir du 19 janvier 2015.
Les déplacements et l’hébergement des contributeurs seront pris en charge pendant la durée du colloque.
Comité scientifique
Madame Badel, Maître de conférence Université de Bordeaux,
Madame Guerlain, Maître de conférence Université de Bordeaux
Madame Hedhili, Maître de conférence Université de Bordeaux
Madame Le Gars Présidente honoraire de la MGEN Gironde, Présidente du CAHSS
Madame Saujeon-Roque, Responsable du Musée national de l’Assurance Maladie
Monsieur Castro, Directeur honoraire de la CMR d’Aquitaine
Monsieur Guillaume, Professeur honoraire Université Michel Montaigne
Monsieur Gallinato-Contino, Professeur Université de Bordeaux
Monsieur Laborde, Professeur Université de Bordeaux
Monsieur Zimmerman, Directeur honoraire CAF Gironde.
Organisation scientifique
Laetitia Guerlain, (Centre aquitain d’histoire du droit, Université de Bordeaux)
Emmanuelle Saujeon-Roque (Comité Aquitain d’Histoire de la Sécurité Sociale) contact : cahss@wanadoo.fr
Organisé par le Comité aquitain d’histoire de la Sécurité sociale et le Centre Aquitain d’histoire du droit – Comptrasec - Université de Bordeaux
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