Journée d'études
organisée à la Bibliothèque Carnegie
par le Centre de Recherches Interdisciplinaires sur les Modèles Esthétiques et Littéraires (CRIMEL), EA 3311, Université de Reims Champagne-Ardenne et l'Institut Universitaire de France
par le Centre de Recherches Interdisciplinaires sur les Modèles Esthétiques et Littéraires (CRIMEL), EA 3311, Université de Reims Champagne-Ardenne et l'Institut Universitaire de France
Le vendredi 16 mai 2014
Responsable scientifique : Antoine Pietrobelli (CRIMEL-IUF) antoine.pietrobelli@gmail.com
Nous héritons d’une conception de la littérature qui a renoncé à tout lien avec le corps. Depuis plus de deux siècles, les textes dits littéraires sont produits et reçus comme des objets autonomes, solitaires et silencieux. Leur oralité n’est que seconde. Lire et écrire sont pour nous des expériences où le corps s’immobilise et s’efface. Depuis le Romantisme a pu également s’imposer une figure de l’homme de lettres dont la santé est minée par l’écriture et la lecture. La littérature, oubli du corps, en serait presque devenue une maladie.
Pourtant dans l’Antiquité, ces activités ont pu être considérées comme des pratiques de santé. Asclépios, le dieu de la médecine, prescrivait aux fidèles, qui venaient implorer la guérison dans son sanctuaire, de composer des hymnes ou de la poésie mélique. Galien aussi considérait que l’écriture littéraire et la performance rhétorique étaient curatives. Des médecins de l’époque impériale, comme Antyllos, Soranos ou Celse délivraient dans leurs ordonnances de la lecture à voix haute (clara lectio) contre les digestions trop lentes, les maux d’estomac ou les quintes de toux. La déclamation oratoire était prescrite aux convalescents pour sa gestuelle comme un exercice soignant le haut du corps et la pratique de la vociferatio (ἀναφώνησις), raffermissant les organes phonatoires, était jugée bénéfique pour la santé, au point que Pline le Jeune ou Plutarque s’y exerçaient quotidiennement.
Il est bien connu que les textes et leur méditation sont une thérapie pour l’âme. Aujourd’hui, dans les pays anglo-saxons, on expérimente avec succès la bibliothérapie pour soigner les troubles de santé mentale. Mais il est plus inattendu que l’écriture poétique ou épistolaire, la lecture à voix haute, la déclamation ou l’action oratoire aient pu constituer des remèdes pour le corps. Les études présentées lors de cette journée s’intéresseront donc moins au contenu et aux bienfaits psychologiques des textes qu’à leurs effets physiologiques. Comment les pratiques anciennes de la lecture et de l’écriture agissaient-elles sur le corps pour le façonner, le raffermir ou le guérir ? Quelle place avaient la lecture et l’écriture dans le régime quotidien et dans la thérapeutique du corps ? En interrogeant les sources littéraires et médicales, il s’agira de mettre en lumière ces potentialités perdues des pratiques lettrées.
Programme :
10h : Accueil des participants
10h 30 : Heinrich von Staden (Institute for Advanced Studies-Princeton) : « Galien sur ses lecteurs »
11h 15 : Antoine Pietrobelli (Université de Reims Champagne-Ardennes-IUF) : « La déclamation comme thérapie chez Antyllos »
12h 00 : Georgia Petridou (Universität Erfurt) : « Poetry for the Mind, Rhetoric for the Body: Literary Remedies and Epistolary Prescriptions in Aelius Aristides’ Hieroi Logoi »
12h 45-14h45 : Pause déjeuner au restaurant Saint-Julien
14h 45 : Pierre Chiron (Université Paris Est-IUF) : « Le corps dans la tradition grecque des exercices préparatoires de rhétorique »
15h 30 : Virginie Leroux (Université de Reims Champagne-Ardennes) : « Les vertus soporifiques de la lecture »
16h 15 : Emmanuelle Valette-Cagnac (Université Paris Diderot - Anhima) : « Usages thérapeutiques de l’épistolarité à Rome »
17h 30-18h30 : Visite de la cathédrale de Reims
20h00 : Dîner au restaurant de l’Hôtel Continental
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