A. Carol, Physiologie de la Veuve. Une histoire médicale de la guillotine, Paris, Champ Vallon, 2012.
Conçue par un médecin et par un chirurgien, la guillotine succède aux
supplices d’Ancien régime et invente la mort pénale idéale : prompte
et douce. Mais des doutes surgissent très vite sur son instantanéité.
Comment concevoir qu’une tête séparée en une fraction de seconde du
corps soit immédiatement et totalement privée de vie, de conscience, de
sensation ? Et si la mort infligée n’est pas immédiate, quelle
souffrance le décapité n’endure-t-il pas !
Cette possibilité physiologique, discutée très tôt par les médecins,
envahit l’art, l’imaginaire et les débats autour de la peine de mort
tout au long du XIXe siècle. Elle alimente un dialogue entre
la société et ces experts autour de l’humanité de la guillotine et ses
alternatives possibles. Mais elle offre aussi aux médecins partagés
entre le désir de rassurer leurs contemporains et celui d’assouvir
leur curiosité de physiologistes des conditions d’expérimentation
proches de la vivisection, qu’il s’agisse de vérifier la survie
éventuelle au pied de l’échafaud ou de tenter de transfuser les têtes
exsangues au laboratoire. Se pose alors la question du corps du
condamné, de ses usages, de sa dignité au regard de la médecine et de la
société, et des pouvoirs qui s’exercent sur lui ; un corps dont les
condamnés n’affirmeront que tardivement le droit à disposer post mortem, à la fin du XIXe siècle.
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