jeudi 13 février 2014

Le cadavre préservé

Le cadavre préservé. Savoirs et pratiques autour de la conservation et l’exposition du corps mort (XVIe-XXe siècle)

Appel à communication



Colloque international
Lieu : Université Paris 1, Panthéon-Sorbonne
Dates : 19-20 septembre 2014

Organisation : Diego Carnevale (Aix-Marseille Université, LabexMed)
Vincent Denis (Université Paris 1, IUF, LabEx HASTEC)


Ce colloque est destiné au public des chercheurs intéressés par l’histoire du corps mort. L’objectif est de réunir des spécialistes reconnus et des jeunes chercheurs autour d’un problème spécifique : les savoirs et les pratiques concernant la conservation et l’exposition des cadavres. En raison des résultats de l’historiographie récente, nous avons choisi de fixer un cadre chronologique assez ample. En effet, la Renaissance et la seconde moitié du XIXe siècle sont désormais considérées comme deux étapes décisives dans le long processus de « médicalisation » du corps, c’est-à-dire du parcours qui a conduit le savoir médical à gagner une position prééminente par rapport aux autres savoirs, notamment religieux, qui interviennent dans la définition du statut du corps. Toutefois, la manipulation du corps mort reste une activité au carrefour entre les savoirs et les techniques scientifiques, religieux et sociaux. L’anthropologie historique nous présente le cadavre comme un pôle d’attraction affective mais aussi de répulsion, à cause du pouvoir de contamination qui lui est attribué par les sociétés européennes. Cette condition ambivalente, très ancienne, a dû se concilier avec la conception chrétienne du corps mort, voué à la résurrection à la fin des temps. A ce socle, les savoirs scientifiques, ainsi que ceux liés à l’artisanat et aux métiers, superposent leur conception du cadavre, en créant une tension permanente entre différentes pôles, que le colloque envisage d’analyser et de problématiser. 

Argumentaire

Le colloque est destiné à un public de chercheurs intéressé par l’histoire du corps, notamment des savoirs et des pratiques autour du cadavre. Depuis une dizaine d’années, en effet, l’histoire du corps mort est entrée dans l’historiographie européenne et anglo-américaine. Parmi les différents aspects examinés, les manipulations du cadavre pour des raisons scientifiques ont été certainement le sujet le plus considéré par les historiens, notamment les dissections anatomiques et les autopsies judiciaires à partir de la fin du Moyen-Âge. Il s’agit, dans les deux cas, des techniques découlant essentiellement de la science médicale et de la pratique chirurgicale, mais qui impliquent en même temps plusieurs formes de savoirs : religieuses, sociales, juridiques. Ces savoirs ne sont pas toujours en accord avec les exigences exprimées par la médecine. Par conséquent, les recherches les plus récentes ont vérifié au fil du temps les divers niveaux d’interaction entre ces différentes dimensions et leurs retombées sur les techniques de manipulation. 

Les manipulations concernant la conservation et la préservation du corps mort ont, quant à elles, suscité une moindre attention. En effet, il est bien connu que les sociétés anciennes ont inventé des techniques pour préserver les cadavres de la décomposition. Cependant, les savoirs qui ont participé à ce développement, comme les techniques elles-mêmes constituent un angle mort de la recherche historique. Parfois, les raisons pour lesquelles le corps mort était conservé ont échappé au regard des historiens : si l’exigence d’exposer le cadavre du roi lors des cérémonies funèbres a fait l’objet de plusieurs enquêtes, on a en revanche consacré très peu d’attention à la conservation des corps pour l’identification judiciaire. Les techniques d’embaumement et leur retombées sociales demeurent très peu étudiées, notamment pour la période de leur apogée, au cours du XIXe siècle. Les méthodes d’analyse sur la conservation naturelle des corps morts, favorisées surtout par l’Église catholique pour vérifier la condition miraculeuse des cadavres réputés saints, ont également été négligées. 

La manipulation du corps mort est une activité au carrefour entre les savoirs (et les techniques) scientifiques, religieux et sociaux. L’anthropologie historique nous a présenté le cadavre comme un pôle d’attraction affective mais aussi de répulsion, à cause du pouvoir de contamination qui lui est attribué par les sociétés européennes. Cette condition ambivalente, très ancienne, a dû se concilier avec la conception chrétienne du corps mort, destiné à la résurrection après la fin des temps. Sur ce socle, les savoirs scientifiques, ainsi que ceux liés à l’artisanat et aux métiers, superposent leur conception du cadavre, en créant une tension permanente entre les trois pôles. 

L’objectif est donc de réunir, autour d’un problème spécifique de l’histoire du corps un groupe composé de spécialistes du domaine et de jeunes chercheurs qui s’y sont intéressés. Parmi les propositions possibles, on privilégiera particulièrement celles portant sur les sujets suivants : 

 théorie et pratique de l’embaumement

 méthodes de conservation de parties de l’anatomie humaine

 la médecine légale

 les analyses médicales lors des procédures de canonisation

 les croyances et les savoirs traditionnels autour de la manipulation du cadavre

 les figures impliquées dans ces opérations et les espaces physiques où elles avaient lieu


Une dimension européenne du colloque s’impose pour apprécier la circulation des modèles et des pratiques dans l’espace continental. Il ne s’agit pas seulement de comprendre les liens entre un savoir produit dans un contexte spécifique et un savoir construit ailleurs selon d’autres modalités, mais aussi de comprendre s’il y a eu une réflexion commune à l’échelle européenne autour de la thématique considérée. 

Le colloque se déroulera en français et en anglais.

La date limite pour la présentation des propositions de communications (pas plus de 500 mots) est le 10 avril 2014.

Les propositions doivent être envoyées sous format électronique aux adresses suivantes :

Diego Carnevale (diego.carnevale@hotmail.it)

Vincent Denis (vincent.denis@univ-paris1.fr)

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