lundi 2 octobre 2023

Les nouvelles sources de l’histoire de la santé

Les nouvelles sources de l’histoire de la santé



Appel à communications et à panels



Pour un colloque envisagé dans le cadre de l’ACFAS 2024 qui se tiendra en mai 2024 à l’Université d’Ottawa (Canada).


Organisé par le réseau Historien.nes de la santé, en partenariat avec l’Unité de recherche sur l’histoire du nursing de l’Université d’Ottawa et la Chaire de recherche sur la francophonie canadienne en santé.



Responsables du colloque : Alexandre Klein, Marie-Claude Thifault et Sandra Harrisson



Depuis une vingtaine d’années maintenant, l’histoire de la santé s’est imposée dans l’historiographie francophone comme un champ de recherche à part entière[1], suscitant tout à la fois la curiosité et l’inventivité de plusieurs générations d’historiennes et d’historiens. Dépassant les cadres étriqués de l’ancienne histoire médicale ou philosophique de la médecine, ils et elles ont quitté les textes savants, les médecins fameux et les institutions réputées pour se glisser au plus près du vécu et des pratiques des acteurs et actrices, officiels ou non, de la santé[2]. Mêlant l’histoire des sciences et des techniques à l’histoire par le bas, l’histoire sociale ou l’histoire des mentalités, des représentations et des sensibilités, ils et elles ont défriché de vastes et nouveaux terrains de recherche que ce soit dans le domaine de l’histoire des patient.es, de l’histoire des professions dites « paramédicales » ou de l’histoire des pratiques de soins et de leurs multiples acteur.ices.

L’un des principaux vecteurs de cette réinvention de l’histoire médicale fut la (re)découverte de nouvelles sources. S’éloignant des traditionnels traités médicaux, revues savantes ou actes officiels de congrès, l’histoire de la santé s’est écrite sur la base de nouveaux documents ou de nouvelles lectures de documents déjà connus[3]. Ainsi a-t-on vu l’histoire des patient.es se forger dans les correspondances et autres égodocuments[4], ou encore au cœur des dossiers médicaux[5] sur lesquels les historien.nes ont réussi à mettre la main, souvent aux termes de longues négociations. L’histoire des infirmières psychiatriques s’est par exemple également appuyée sur ces sources inédites pour faire entendre la voie de ces soignantes à part entière, toujours présentes, mais pourtant silenciées par l’historiographie traditionnelle[6]. Les archives privées ont également permis de voir émerger des institutions ou des personnages secondaires et oubliés[7], tandis que les archives militaires[8], judiciaires[9] ou financières[10] offraient des occasions d’envisager sous d’autres angles des lieux ou des pratiques de soins. Le recours aux archives orales[11], radiophoniques ou cinématographiques[12] a également permis de faire sortir de l’ombre (ou du silence) des voix jusqu’alors ignorées de l’histoire de la santé. Bref, une multiplicité de sources nouvelles ou de regards nouveaux portés sur des sources déjà connues a assuré un développement sans précédent à l’histoire francophone de la santé, révélant tant sa profonde diversité que sa grande richesse historiographique.

C’est sur cette question particulière des sources de l’histoire francophone de la santé et de leurs effets historiographiques que nous souhaitons nous pencher lors de cette rencontre. Quelles sont les nouvelles sources de l’histoire de la santé ? Comment les travailler ? Quelles modifications du regard historien, de la méthodologie ou de l’approche historiennes ont-elles engendrées ? Quelles difficultés, obstacles ou défis impliquent-elles pour l’historien.ne ? Quel rôle a pu jouer l’interdisciplinarité dans leur découverte, leur usage ou leur approche ? Comment s’organise le dialogue avec les sources plus traditionnelles de l’histoire médicale ? Quel rôle pour les archivistes dans ce nouveau mouvement historiographique ? Telles sont quelques-unes des questions qui pourront être abordées par les communications ou les panels proposés pour cette rencontre qui vise à plonger dans l’atelier même de ces historien.nes de la santé qui renouvellent ce champ d’études à part entière et l’affirment ainsi comme un incontournable de l’historiographie contemporaine.

Les propositions de communications (maximum 500 mots) ou de panels (3 à 4 résumés de communications accompagnés d’un résumé du panel de 250 mots maximum) sont à envoyer avant le 30 novembre 2023 à aklein@uottawa.ca.



[1] Alexandre Klein et Séverine Parayre (dir.), Histoire de la santé (XVIIIe-XXe siècles). Nouvelles recherches francophones, Québec, Presses de l’Université Laval, 2015

[2] Alexandre Klein, « L’histoire de la santé : le renouveau interdisciplinaire de l’historiographie médicale francophone », Revue d’histoire de l’Université de Sherbrooke, vol. 9, no 2, automne 2016, http://rhus.association.usherbrooke.ca/wp-content/articles/921.pdf

[3] On peut penser ici au travail de Philippe Artières et Janine Pierret sur le sida : Philippe Artières et Janine Pierret, Mémoires du sida. Récit des personnes atteintes. France, 1981-2012, Paris, Bayard, 2012.

[4] Micheline Louis-Courvoisier et Séverine Pilloud, « Le malade et son entourage au XVIIIe siècle : les médiations dans les consultations épistolaires adressées au Dr Tissot », Revue médicale de suisse romande, vol. 120, no 12, 2000, p. 939-944 ; Séverine Pilloud, « Mettre les maux en mots, médiations dans la consultation épistolaire au XVIIIe siècle : les malades du Dr Tissot », Bulletin Canadien d’histoire de la médecine, vol. 16, no 2, 2000, p. 215-245 ; Philippe Rieder, La figure du patient au XVIIIe siècle, Genève, Droz, 2010 ; Séverine Pilloud, Les mots du corps : expériences de la maladie dans les lettres de patients à un médecin du XVIIIe siècle : Samuel-Auguste Tissot, Lausanne, BHMS, 2013 ;

[5] André Cellard et Marie-Claude Thifault, Une toupie sur la tête. Visages de la folie à Saint-Jean-de-Dieu au tournant du siècle dernier, Montréal, Boréal, 2007 ; Hervé Guillemain, Schizophrènes au XXe siècle. Des effets secondaires de l’histoire, Paris, Alma, 2018 ; Benoît Majerus et Anne Roekens, Vulnérables. Les patients psychiatriques en Belgique (1914-1918), Namur, Presses universitaires de Namur, 2018.

[6] Voir par exemple : Sandra Harrisson, Déshospitalisation psychiatrique au sein de la communauté francophone est-ontarienne, 1976-2006 : une approche socio-historique. Thèse doctorale déposée à la bibliothèque de l’Université d’Ottawa, 2017.

[7] Voir par exemple : Hervé Guillemain, « Des institutions privées d’histoire. Enquête sur les archives d’entreprises capitalistes dédiées à la gestion de la folie (France, 1930-1950) », Santé mentale au Québec, volume 41, numéro 2, automne 2016, p. 101-118 ou Alexandre Klein, « Charlotte Tassé (1893-1974), infatigable promotrice du modèle de la garde-malade canadienne-française », Recherche en soins infirmiers, vol. 134, no. 3, 2018, p. 78-93.

[8] Aude-Marie Lalanne Berdouticq, « La politique des indicateurs. Usages politiques et scientifiques des indices d’aptitude militaire, France/Grande-Bretagne, 1914-1923 », Histoire, médecine et santé, 22 | 2022, p. 105-122.

[9] Fleur Beauvieux, « “ […] l’ayant secouru jusque a la mort”. Les relations sociales à Marseille en temps de peste (1720-1722) », Histoire sociale/Social History, vol. LIV, no 112 (Novembre / November 2021), p. 529-550.

[10] Pauline Teyssier, « Financer le traitement de la folie entre Révolution et Empire : une approche de la maison de Charenton par les comptes (1797-1814) », Annales historiques de la Révolution française, vol. 407, no. 1, 2022, p. 179-204.

[11] Martine Sin Blima-Barru, « Des sources complémentaires aux archives orales collectées par le Comité d’histoire de la Sécurité sociale », Revue d'histoire de la protection sociale, vol. 10, no. 1, 2017, p. 192-193.

[12] Raphaël Tinguely, « Des films pédagogiques pour le personnel infirmier en psychiatrie de la Waldau dans les années 1920-1930 ? » Cinéma et psychiatrie en Suisse et en Europe, 9 mai 2021, https://waldau.hypotheses.org/397 .

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