samedi 14 mars 2020

Médecine et la chirurgie médiévales

La médecine et la chirurgie médiévales : héritages, innovations et contrôle des savoirs et savoir-faire

Symposium au Congrès 2020 de la SFHST


Annulé pour cause de Covid-19

Vendredi 17 avril 2020, 13h50-17h
Faculté de médecine de Montpellier, 2 rue de l’Ecole de médecine.

Intervenantes (par ordre chronologique) :
Mehrnaz Katouzian-Safadi, Dominique de Courcelles,
Hélène Leuwers, Laetitia Loviconi
1. Considérations théoriques et pratiques des médicaments simples chez Râzî* (m. 925)
Mehrnaz Katouzian-Safadi CNRS-UMR 7219- Laboratoire Sciences, Philosophie, Histoire (SPHERE) -CHSPAM /Université Denis Diderot Paris 7 - Rue Thomas Mann-Case 7093- 75205 Paris Cedex 13 / France – Université Denis Diderot Paris – France
Le savant et médecin Râzî ou Rhazès en latin (865 – 925) a marqué l’histoire de la médecine par ses citations exactes de ses propres sources, par les précisions de ses diagnostics, par l’invention des traitements (Katouzian-Safadi, Ethnopharmacologia, 2014, n◦ 52) et par la réflexion, les doutes et la prudence engagés lors des diverses formes de thérapies (Katouzian-Safadi & Bonmatin, 2014, Oxford & Philadelphia, p. 334-49). Il a vécu au sein des grands centres urbains entre l’Iran et l’Iraq d’aujourd’hui où il a dirigé des hôpitaux et examiné un grand nombre de malades. Cela lui a permis une meilleure lecture des symptômes des maladies. Il a voyagé dans un vaste espace géographique, entre les villes de Ray (près de Téhéran actuel), de Bagdad et de Nayshabûr (Nord-Est de l’Iran actuel). Ces déplacements lui ont permis de connaître des médicaments locaux non cités dans les textes de ses prédécesseurs et de les intégrer à ses habitudes thérapeutiques et à ses écrits.
Je m’intéresse à une des oeuvres majeures en médecine de Râzî, le Kitâb al-Mansûrî fî al-tibb, (Le livre de Mansûr en médecine). Cet ouvrage écrit en Arabe a été traduit en Latin sous le nom Liber ad Almansorem (Jacquart, Revue Histoire des textes, 1994, p. 359-74) ; il a eu une grande diffusion en Orient comme en Occident dans son entier mais aussi par chapitre ; il a été un des socles fondateurs pour l’enseignement et pour la pratique médicale à l’époque médiévale et jusqu’à la Renaissance. Dans cet ouvrage, j’ai étudié la thérapie médicamenteuse basée sur des médicaments simples et composés. Dans un travail précédant, j’ai analysé les médicaments composés dans ce livre (Katouzian-Safadi & Karamati, Paris, 2018, p. 21-52). Dans le présent exposé, j’examine cette même oeuvre sous l’angle des médicaments simples. Le chapitre trois de cet ouvrage est consacré à « La connaissance des forces des aliments et des médicaments ». Les substances simples y sont présentées selon diverses formes d’ordonnancement. L’examen du choix de ces diverses formes révèle des présupposés théoriques et des nécessités pratiques. Je présente ces diverses formes d’ordonnancements et si nécessaire, je les compare à ceux d’al-Qanûn fî-al-tibb (Le Canon de la médecine) d’Ibn Sînâ / Avicenne. Cette analyse permet de déceler quelques choix opérés par notre médecin Râzî, lors de la conception de cette oeuvre.
* La translittération est simplifiée volontairement

2. Les écrits médicaux d’Arnau de Vilanova (1238-1311) : l’exemple du Regiment de sanitat (vers 1299) en langue vulgaire catalane
Dominique De Courcelles Paris Sciences et Lettres – École normale supérieure [ENS] - Paris – France
Arnau de Vilanova est sans doute l’un des plus éminents médecins de l’Europe médiévale, entre Galien et Paracelse. Son expérience et ses compétences sont très vite reconnues par les princes et les papes qui ne cessent de l’inviter à leurs cours pour y exercer son art. La communication présentera d’abord la formation d’Arnau de Villanova et une vision d’ensemble de sa production médicale, toujours en langue latine, avant de donner une analyse du Regiment de sanitat en langue catalane, sans doute rédigé en latin vers 1299 à Montpellier. Ecrit à la demande du roi Jacques II d’Aragon, le livre a pour objectif de donner une doctrine facile à appliquer pour " vivre sainement et venir à naturelle vieillesse ". La reine Blanche d’Aragon, désirant que ce livre puisse profiter à ceux qui ne comprennent pas le latin, ordonne alors à Berenguer Sarriera, " chirurgien ", de le traduire vers 1305 de latin en langue romane catalane. Le chirurgien a traduit avec un soin remarquable le texte latin et a ajouté des rubriques marginales qui en facilitent l’application. La communication montrera quelles thématiques d’Arnau de Vilanova ont particulièrement suscité l’intérêt du traducteur.

3. Évaluer les savoirs et les savoir-faire de la chirurgie à Paris et à Londres (1350-1550)
Hélène Leuwers
ED 395 – Université Paris Nanterre – France. UR MéMo - Histoire des mondes médiévaux et modernes – Université Paris Nanterre – France
À Paris et à Londres, une des innovations de la fin du Moyen Âge tient à la fixation de dispositifs d’évaluation des savoirs et des savoir-faire obligatoires pour exercer la chirurgie. Les examens de capacité permettent aux métiers de la barberie et de la chirurgie d’autoriser l’exercice des seuls praticiens jugés " suffisants " à l’issue d’un cycle d’apprentissage chez un maître et de contribuer à la lutte contre l’exercice irrégulier. Quelques récits d’évaluation, contenus dans des documents judiciaires, notariés et dans les diplômes de graduation conservés, offrent des indices pour identifier les connaissances et les techniques attendues des acteurs ordinaires de la chirurgie et pour reconstituer les modalités de leur évaluation. La confrontation des dossiers parisiens et londoniens interroge à la fois les traits communs et les spécificités propres à chaque capitale. En outre, l’approche croisée fait apparaître, à Paris et à Londres, une intégration semblable des médecins dans la composition des jurys d’examens de qualification. Aux côtés des maîtres chirurgiens et des maîtres barbiers, ils jugent les savoirs et l’habileté d’un candidat à l’exercice de la chirurgie. Cette composition interprofessionnelle des jurys éclaire les relations qu’entretiennent les barbiers, les chirurgiens et les médecins sur le terrain des pratiques, autant que la transformation des rapports de force entre les différents groupes professionnels de chaque milieu de santé urbain. Le rôle des médecins dans l’examen de la chirurgie, le format de l’interrogation des candidats, l’organisation de cérémonies de graduation invitent aussi à questionner la place des connaissances médicales et l’influence du modèle universitaire dans le contrôle des pratiques chirurgicales des deux villes.

4. Le diagnostic médiéval des maladies affectant les facultés animales (estimative, imaginative, sensibilité, motricité) à travers quelques practicae des XIVe et XVe siècles
Laetitia Loviconi
École pratique des hautes études, PSL – équipe Saprat – Paris – France.
À travers plusieurs ouvrages de pratique médicale (practicae) des XIVe et XVe siècles, on se propose d’examiner comment les médecins de la fin du Moyen Âge établissaient le diagnostic des maladies altérant, abolissant ou diminuant les opérations considérées comme relevant de la vertu animale dans le cadre du galénisme. On s’attachera en particulier à la question du diagnostic différentiel, qui vise à distinguer des maladies d’apparence voisine et constitue une démarche clé de la pratique médicale, s’appuyant sur la sémiologie et la nosologie. Nous analyserons les méthodes proposées pour diagnostiquer des maladies telles que la manie, la mélancolie, la léthargie, le subeth, l’apoplexie, la syncope et la suffocation de matrice. Nous porterons notre attention sur les signes mobilisés, les sources des auteurs et les enjeux de ces diagnostics.

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