Les territoires de la génétique : nouvelles perspectives
Appel à communication
Journées 2026 de la Shesvie
Paris, du 20 au 22 mai
A côté de l’ « industrie darwinienne », la génétique est le second grand domaine des sciences de la vie à avoir donné lieu à une historiographie abondante depuis les années 1960-1970 et l’institutionnalisation de l’histoire de la biologie, comme en attestent par exemple les entrées du Journal of the History of Biology. Cela a conduit à un enrichissement considérable de nos connaissances pour ce qui concerne les sujets les plus essentiels, comme par exemple (sans souci d’exhaustivité) : la place qui revient aux travaux de Mendel et le contexte de leur « redécouverte » en 1900 ; l’essor de la génétique dite classique au cours de la première décennie du XXe siècle ; l’établissement de la théorie chromosomique de l’hérédité ; l’eugénisme ; la fondation de la génétique moléculaire. Beaucoup de ces travaux ont en outre été conduits avec une perspective comparatiste, ce qui a permis de révéler des « styles » locaux dans la façon dont la génétique s’est développée tout au long du siècle dernier.
En parallèle de cet approfondissement continu des connaissances historiographiques, on constate également, au cours de la même période (1970-présent), le développement d’un discours nettement plus critique et normatif envers la génétique, porté par de nombreuses disciplines des sciences humaines. La génétique a non seulement été prise pour objet, elle aura également été prise à partie. Dans le domaine de la philosophie des sciences, le concept de gène a ainsi donné lieu à de multiples critiques, et il y a eu des philosophes pour pronostiquer sa désuétude prochaine et le bien-fondé de sa suppression (Keller 2003). De la même manière, le « géno-centrisme » de la théorie de l’évolution a lui aussi été l’objet d’une littérature aussi foisonnante qu’hétérogène (comme en attestent les nombreux travaux en lien avec l’ « Extended Evolutionary Synthesis »). Ces critiques répétées du réductionnisme génétique n’ont pas été sans effet sur l’historiographie elle-même dans sa façon d’envisager ce qu’a été la naissance (mendélienne) de la génétique (Radick 2023). Ce faisant, il semble qu’on oublie que si le XXe siècle a bien été le siècle du gène, c’est d’abord parce que la génétique a profondément transformé la plupart des disciplines biologiques, à la manière de la théorie cellulaire au XIXe siècle.
L’objet de cette journée d’étude (20 mai), et au-delà la thématique retenue pour le congrès de la SHESVIE (21-22 mai), sera d’explorer, dans toute leur richesse et épaisseur historienne, les territoires (théoriques et empiriques) effectivement transformés par l’approche génétique. Ceux-ci, comme nous le verrons, ont été fort divers, ce qui explique que la génétique soit très souvent une science qui appelle la qualification de son domaine de mise au travail : génétique moléculaire, génétique du développement, génétique des populations, génétique humaine, etc. En cela, le concept de gène semble bien avoir fonctionné comme celui de cellule à la fin du XIXe siècle, lorsqu’il y eut quelque chose comme une « cellularisation » des disciplines biologiques : l’anatomie, la physiologie et l’embryologie (entre autres) sont devenues cellulaires à ce moment. C’est très probablement un mouvement de cet ordre auquel on assiste tout au long du XXe siècle et jusqu’à aujourd’hui, mouvement général dont il s’agit de réactiver le sens sur la base de multiples études spéciales.
Nous attendons vos propositions d’interventions (500 mots) pour le 30 janvier 2026 (contact@shesvie.fr), aussi bien sur la thématique des territoires de la génétique qu’en varia.
Keller E.F., 2003, Le siècle du gène, Paris, Gallimard.
Radick G., 2023, Disputed Inheritance, The Battle over Mendel and the Future of Biology, Chicago and London, The University of Chicago Press.

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