mardi 13 février 2024

Les fabriques de la norme hygiéniste

Les fabriques de la norme hygiéniste. De 1830 à nos jours

Appel à contribution


Le concept d’hygiène publique, qui s’impose en France au cours du XIXe siècle, mobilise diverses disciplines, à l’instar de la médecine, de la chimie, de l’urbanisme, des statistiques, de l’économie politique, etc. En s’appuyant sur la science du temps, les hygiénistes entendent supprimer les foyers d’infection et modifier des comportements jugés néfastes. Un tel projet implique la création d’une normativité renouvelée susceptible de mettre en œuvre cette évolution sociétale. Ce colloque invite à questionner les fabriques de la norme hygiéniste depuis les années 1830 jusqu’à nos jours, en examinant de quelle manière le discours hygiéniste pénètre les différentes sources du droit, ainsi que la problématique du meilleur échelon d’intervention en matière d’hygiène publique et les tensions à l’œuvre entre le centre et les périphéries.

La réflexion relative aux fabriques de la norme sanitaire peut se déployer autour de plusieurs axes thématiques : Les origines de la norme hygiéniste : A compter du XIXe siècle, le développement des sciences va permettre un déploiement du discours hygiéniste. Il convient de s’intéresser aux hommes et aux idées qui vont participer à sa diffusion et à leurs opposants. Des hygiénistes promeuvent les principes de « solidarité sanitaire » et de « croisade sanitaire », qui légitiment la limitation de la liberté individuelle en imposant des obligations telles que la vaccination des enfants ou des jeunes adultes, la désinfection… De même, ce solidarisme entre en conflit avec le droit de propriété lorsqu’il souhaite imposer l’assainissement des logements insalubres. Les libéraux s’opposent à cet idéal hygiéniste qu’ils jugent liberticide.
Ensuite les lieux de diffusion doivent être questionnés. Les hygiénistes peuvent investir les conseils de salubrité, les conseils municipaux et poursuivre leur cursus honorum au sein de la représentation nationale. Mais, il existe également des instances de réflexion à l’instar de l’Académie de médecine qui, dès 1820, se donne pour objectif de traiter les questions de santé publique, ou encore les congrès nationaux et internationaux.
Le niveau de création et d’intervention de la norme hygiéniste : La norme hygiéniste peut être localisée, d’ordre règlementaire et bureaucratique, ou fondée avant tout sur la loi au niveau national. Cela étant, l’échelon local est intervenu le premier, plusieurs villes ont produit une règlementation sanitaire bien avant les grandes lois nationales (Le Havre, Grenoble, Reims, etc.).
Le discours des hygiénistes parvient-il à pénétrer la normativité locale, existe-t-il une réception différenciée entre villes et municipalités rurales, alors que les questions relatives au coût des mesures sanitaires doivent être soulevées ?
La norme hygiéniste entre décentralisation et centralisation : Cette norme parvient-elle à se déployer pleinement dans un cadre décentralisé qui fait la part belle aux collectivités locales, notamment aux municipalités, comme le suggère les textes adoptés au XIXe siècle ? Pourquoi et comment, au siècle suivant, des idées centralisatrices tendent à se développer, avec plus ou moins de succès ?
Le colloque entend aussi explorer la problématique de l’impérialisme sanitaire, hygiéniste et médicale dans nos sociétés contemporaines, menaçant l’équilibre entre les nécessaires politiques de sécurité sanitaire dont bénéficient les populations et le respect des libertés individuelles et collectives. Il s’agira alors de questionner les risques, juridiques et politiques qui accompagnent les ambitions d’une société du risque zéro. Ceux-ci apparaissent comme les conséquences d’une biosécurité qui consiste en un écrasement de la politique et des choix normatifs par l’obsession de la maîtrise des risques réalisée par une série de mesures et d’actions de nature essentiellement préventive reposant sur des moyens techniques, scientifiques ou simplement para-scientifiques ayant pour effet de réduire la question de l’organisation sociale à des choix qui ne relèvent au fond que de l’impératif de la nécessité pour affronter des phénomènes considérés inéluctables par nature. Les contributeurs seront amenés à s’interroger sur les tensions juridiques révélées par le nouvel état d’urgence sanitaire et les progrès des dispositifs de contrôle social dont l’ambition est de permettre la surveillance des populations non pas au nom de la santé mais davantage selon une conception d’une vie ni vraiment saine, ni vraiment malade (voir en ce sens la figure contradictoire du malade asymptomatique), mais toujours perçue comme potentiellement pathogène pouvant justifier en retour et pour le bien de tous la limitation des droits et libertés de chacun.

L’approche se veut pluridisciplinaire : histoire des lettres et du droit, droit public, sociologie.
 

Modalités de soumission

Date limite de l’appel à contribution : 29 mars 2024

Les contributeurs sont invités à envoyer un résumé de 3000 signes (espaces compris) ainsi que le titre de leur éventuelle communication aux adresses suivantes, pierre.belda@univ-orleans.fr et dominique.messineo@univ-orleans.fr
 

Date et lieu du colloque

5 décembre 2024, Centre international universitaire pour la recherche (Hôtel Dupanloup - Orléans)
 

Comité scientifique Pierre Allorant, Professeur des universités, Doyen de la faculté de droit économie gestion de l’université d’Orléans.
Pierre Belda, MFC Histoire du droit, université d’Orléans.
Fouad Eddazi, MCF Droit public, université d’Orléans.
Dominique Messineo, MFC Histoire du droit, université d’Orléans.
François Priet, Professeur émérite Droit public, université d’Orléans
 


Contacts Dominique Messineo
courriel : dominique [dot] messineo [at] univ-orleans [dot] fr

Pierre Belda
courriel : pierre [dot] belda [at] univ-orleans [dot] fr

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