Savoirs et conflits (XVIe-XIXe siècle)
Appel à communications
22 et 23 octobre 2021 au Campus Condorcet, en partenariat CAK-TEMOS
Appel à communications
22 et 23 octobre 2021 au Campus Condorcet, en partenariat CAK-TEMOS
Depuis plusieurs décennies, sous l’impulsion de diverses traditions historiographiques, une histoire sociale et culturelle a permis de réinscrire les logiques savantes dans leur cadre sociopolitique et historique. Ses différents courants ont pris en charge à nouveau frais la question du rapport entre production de savoirs et conflictualité, selon plusieurs directions que ce colloque entend questionner et prolonger. Centré sur l’Europe et ses prolongements impériaux du XVIe siècle au XIXe siècle, ce colloque s’articule autour de trois axes principaux : l’analyse des conflits de savoirs dans le cadre des dynamiques antagonistes qui les encadrent, l’investigation sur la production de savoirs en temps de conflits, et une réflexion autour des savoirs produits sur les conflits.
L'histoire des sciences a longtemps été dominée par une vision idéaliste et positiviste, visant à reconstituer les étapes ayant permis à la pensée scientifique de « progresser » sur le chemin de la rationalité, de l’objectivité et de la vérité. Au sein de cette narration, les hommes de sciences apparaissaient comme des figures héroïques devant lutter contre différentes entraves (politiques et religieuses) leur permettant de constituer un champ savant autonome dégagé des intérêts partisans. Dans ce schéma, la longue période allant de la Renaissance à l’âge industriel aurait constitué un moment décisif dans la quête d’indépendance de l’homme de science face aux Églises et aux logiques du patronage princier. Selon ce point de vue, la conflictualité à laquelle les savants se sont confrontés est avant tout pensée comme externe à leurs pratiques proprement scientifiques. Or, depuis plusieurs décennies, sous l'impulsion de diverses traditions historiographiques, une histoire sociale et culturelle des savoirs s'est mise en place, visant à réinscrire les logiques savantes dans leur cadre sociopolitique et historique. Ses différents courants ont pris en charge à nouveau frais la question du rapport entre production de savoirs et conflictualité, selon plusieurs directions que ce colloque entend questionner et prolonger.
Dans un premier temps, cette nouvelle histoire des savoirs – en lien avec les approches de la sociologie des sciences ou des sciences studies – s’est beaucoup occupée à analyser les conflits de savoir, qu’ils s’agissent des oppositions entre savants, entre les hommes de science et d’autres acteurs du monde social ou encore les querelles entre différents domaines disciplinaires et intellectuels. Dans ce cadre, l’étude des controverses a dominé les questionnements depuis une quarantaine d’années, non seulement parce que l’entrée par les controverses apportait des cas d’étude localisés, mais plus largement parce qu’elles offraient une méthode pour aborder l’économie des savoirs au sens large. Si ces travaux ont constitué des jalons essentiels pour réintroduire la conflictualité comme une donnée routinière de la pratique des sciences et des savoirs, ils ont eu tendance à évacuer d’autres types de conflits de savoirs ou à les rabattre sous le chapeau trop uniforme de la controverse. Ce colloque invite donc à reprendre ces questions en réintroduisant les conflits de savoir, du XVIe au XIXe siècle, dans le cadre de dynamiques antagonistes qui les encadrent (1ère axe).
Plus particulièrement, cette réflexion sur les savoirs discutés et disputés peut également être prolongée sous l’angle de la production des savoirs en temps de conflits, notamment guerriers. En effet, nombre des controverses, querelles ou disputes savantes sont enchâssés dans des moments de conflits qui les dépassent et les encadrent. À cet égard, l’époque qui va du XVIe au XIXe siècle constitue un laboratoire d’étude fertile pour interroger ce type de relation. Des guerres de religions aux conflits coloniaux, des affrontements interétatiques aux différentes guerres civiles, insurrections et révolutions, la production des savoirs sur ces quatre siècles échappe rarement à ce contexte conflictuel, et s’avère reconfigurée et façonnée par celui-ci selon des moments et mouvements qu’il convient d’analyser. En effet, la production de savoir ne s’éteint pas malgré le fracas des armes et le tumulte des combats, mais elle est astreinte à s’adapter aux contraintes induites par les contextes conflictuels. Si l’activité savante peut être gênée, empêchée, retardée par les conflits, elle peut, à l’inverse, être alimentée, encouragée et stimulée par des contextes agonistiques. Ce colloque envisage dès lors d’approfondir cette réflexion autour de la production des savoirs en temps de conflits, quelle que soient les formes qu’ils puissent prendre (2ème axe).
Or, les conflits ne constituent pas seulement une toile en arrière-fond de la production savante qu’elle teinterait de quelques couleurs mineures. Les conflits suscitent également des réflexions et des recherches sur le fait conflictuel lui-même, qui devient l’objet d’investigation des acteurs du monde savant. Il peut s’agir de savoirs utiles en temps de conflits, comme ceux qui relèvent de l’art de la guerre, de la manière de conduire les sièges, de déplacer une armée, de l’approvisionner, de manœuvrer une escadre navale, ou de réflexions permettant d’envisager l’après-conflit, comme la conclusion des paix, la reconstruction des territoires, les modalités de l’annexion des espaces conquis. En outre, les conflits stimulent des réflexions juridiques, philosophiques, morales et théologiques sur les notions de guerre juste, d’ordre international, de droit de la guerre, sur les typologies de conflit et irriguent même les sciences du vivant où la conflictualité peut être considérée comme une donnée essentielle du fonctionnement des êtres animés. En ce sens, un dernier axe possible pour ce ce colloque interrogera la multiplicité de la production de savoir sur le conflit. (3e axe)
Ces trois axes permettent de réfléchir à la relation entre la production des savoirs et les conflits du XVIe au XIXe siècle. Dans le cadre de ce colloque, il conviendra de croiser les approches et d’associer les recherches en sciences humaines et sociales à d’autres historiographies. Le cadre géographique de ce colloque s’articule principalement autour de l’Europe et ses extensions impériales, sans pourtant s’y restreindre. En effet, des communications sur d’autres espaces pourront être proposées afin d’élargir la perspective et la réflexion du colloque.
Modalités de soumission
Les propositions en français ou en anglais, d’une longueur maximale de 300 mots et accompagnées d’un bref curriculum vitae, devront être envoyées à savoirsconflits2021@gmail.com avant le 30 avril 2021.
Calendrier
Ouverture de l’appel à communication : 16 février 2021
Date limite de réception des propositions : 30 avril 2021
Organisateurs
Oury Goldman (TEMOS)
Geoffrey Phelippot (EHESS-CAK)
Aurélien Ruellet (TEMOS)
Comité scientifique
Oury Goldman (TEMOS)
Geoffrey Phelippot (EHESS-CAK)
Aurélien Ruellet (TEMOS)
Anne Rasmussen (EHESS-CAK)
Natalie Richard (TEMOS)
Antonella Romano (EHESS-CAK)
Oury Goldman (TEMOS)
Geoffrey Phelippot (EHESS-CAK)
Aurélien Ruellet (TEMOS)
Comité scientifique
Oury Goldman (TEMOS)
Geoffrey Phelippot (EHESS-CAK)
Aurélien Ruellet (TEMOS)
Anne Rasmussen (EHESS-CAK)
Natalie Richard (TEMOS)
Antonella Romano (EHESS-CAK)
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