Aptitude militaire et sélection médicale des recrues (France-Angleterre, années 1900-1918)
Soutenance de thèse d'Aude-Marie Lalanne Berdouticq
La soutenance se déroulera le samedi 12 décembre 2020 à 14h, en visioconférence.
Le jury sera composé de :
Monsieur Stéphane Audoin-Rouzeau, Directeur d’études, EHESS
Madame Annette Becker, Professeure des Universités, Université Paris Nanterre (directrice de thèse)
Monsieur Adrian Gregory, Professeur, Université d’Oxford
Monsieur Heinrich Hartmann, Professeur, Université de Bâle (rapporteur)
Madame Anne Rasmussen, Directrice d’études, EHESS (rapportrice)
Monsieur Jay Winter, Professeur, Université de Yale
Les personnes souhaitant assister à la soutenance sont priées de me le faire savoir par retour de mail d’ici le 11 décembre. Elles recevront ensuite un mail avec un lien « Teams ». Il leur sera demandé de couper leurs micros et leurs caméras durant toute la durée de la soutenance. En cas de difficultés avec le logiciel Teams, n'hésitez pas à me le faire savoir en amont.
Résumé de la thèse
Au début du xxe siècle, les armées européennes font dépendre le recrutement de leurs troupes d’un processus de sélection mené par des médecins militaires. Les candidats sont soumis à un examen au terme duquel les individus considérés comme inaptes sont écartés du rang. Au croisement de l’anthropologie historique, de l’histoire des sciences et de l’histoire des sociétés en guerre, cette thèse entend montrer que l’aptitude militaire est une notion aussi bien médicale qu’administrative et sociale, profondément dépendante du contexte politique dans lequel elle est invoquée.
À la fois résultat et processus, la sélection médicale des recrues peut être abordée comme un dispositif : elle constitue un système organisé de manière rationnelle, influencé par des savoirs techniques et mis en œuvre par l’État par le biais de l’institution militaire. Ce dispositif a des visées pratiques : renforcer l’efficacité de l’armée, préserver la troupe de la menace épidémique et répartir équitablement les obligations militaires. Il a également une fonction stratégique de pouvoir. Du fait de la montée de l’eugénisme et des préoccupations liées à la puissance des armées de masse, les conditions, critères de l’aptitude, ainsi que les données statistiques issues de la sélection font l’objet d’un intense débat épistémologique et politique qui permet d’observer aussi bien les transferts et circulation des savoirs que la préservation d’irréductibles spécificités nationales.
Dans un contexte de compétition internationale, l’intervention des experts médicaux dans le recrutement rejoint des enjeux stratégiques, politiques et sanitaires. En conséquence, l’ensemble du dispositif est placé sous haute surveillance. La Grande Guerre constitue à cet égard un moment critique. L’entrée en guerre met le processus de sélection à rude épreuve et l’examen médical est rapidement gouverné par une logique du rendement, qui fait primer la quantité des effectifs sur leur qualité. Face à l’affaiblissement de la sélection, émergent des entreprises de contestation qui parviennent à peser sur les gouvernements. La Grande-Bretagne se voit contrainte de procéder à une réforme en apparence radicale qui passe par la démilitarisation complète des opérations médicales du recrutement. En France, l’inquiétude reste circonscrite au débat technique et les solutions apportées sont le fait des hygiénistes. Elles relèvent de la gestion de crise sanitaire. Dans les deux pays toutefois, les mesures prises par la puissance publique visent essentiellement à restaurer la confiance en renforçant le poids des experts médicaux. Elles ont des effets limités sur le processus et les résultats de la sélection elle-même.
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