mardi 12 novembre 2019

Le cadavre, de la biologie à l’anthropologie, 40 ans après

De la chair, des os, des idées. Le cadavre, de la biologie à l’anthropologie, 40 ans après.

Appel à communications


Colloque international et interdisciplinaire
Marseille, du 17 au 19 juin 2020
Atelier interdisciplinaire sur le fait mortuaire
ADES UMR 7268 (AMU, CNRS, EFS)

En 2020, l’ouvrage de Louis-Vincent Thomas Le cadavre, de la biologie à l’anthropologie publié en 1980, aura 40 ans. Paradoxalement, alors que l’œuvre de l’anthropologue est très fréquemment mentionnée, le travail de l’auteur et cet ouvrage semblent encore mal connus. Nous proposons donc d’en discuter le propos et la postérité en demeurant fidèles à l’approche de son auteur, c’est-à-dire en
mobilisant un large spectre d’approches disciplinaires. Il s’agira en effet de continuer à « rompre les frontières académiques et de disposer de clés d’entrée qui font […] éclater les spécialisations »1, afin d’appréhender le cadavre en tant que fait social total.
Les 40 ans de l’ouvrage représentent ainsi pour notre collectif, bâti autour d’un intérêt commun pour le fait funéraire, une occasion d’interroger à nouveaux frais, et de façon critique, la portée de son contenu en replaçant le cadavre au centre des débats scientifiques qui se sont déployés au cours des dernières décennies.
L’archéologie, l’histoire, le droit, la sociologie, l’anthropologie sociale ou la psychologie ont en effet investi la question de la mort sous cet angle, et de nombreux travaux nous offrent la possibilité de nourrir un riche débat sur l’objet « cadavre ». Plusieurs thématiques nous paraissent pouvoir ainsi être débattues lors de ces trois journées de travail.

1 - Approches pluridisciplinaires du cadavre
Le cadavre est un objet polysémique qui permet de penser et d’aborder la société de différentes façons ; il a à ce titre suscité l’intérêt de différentes disciplines.
Chez les historiens, quelle place attribuer à la contribution de Louis-Vincent Thomas en regard d’autres travaux qui se sont intéressés à l’évolution de la perception du cadavre et des pratiques funéraires dans les grands champs de l’histoire des émotions ou de l’histoire du corps ?
Quel rôle l’ouvrage de Louis-Vincent Thomas a-t-il joué dans l’évolution des pratiques archéologiques contemporaines ? Comment a-t-il contribué à faire émerger le cadavre au coeur de l’archéologie ? Dans le champ de la sociologie de la mort, comment considérer l’apport du Cadavre, de l’anthropologie à la biologie ?
L’ouvrage a-t-il participé à déplacer ou reformuler certaines problématiques ? Les anthropologues sociaux, pour leur part, peuvent-il travailler sur l’objet « cadavre » sans intégrer le regard de Louis-Vincent Thomas ? Les juristes, les philosophes, les éthiciens et les médecins ont-ils trouvé dans l’ouvrage publié en 1980 matière à nourrir leurs réflexions ? Les contributions attendues pourront retracer voire approfondir ces différentes approches disciplinaires du cadavre, qui obligent à poser aussi la question de(s) épistémologie(s) des approches scientifiques du corps mort.
2 - Le traitement du cadavre : objet sacré, déchet, marchandise, objet scientifique
Dans le prolongement de l’approche de Louis-Vincent Thomas il nous paraît nécessaire d’aborder le cadavre du point de vue de sa matérialité, et de poser la question des différents statuts attribués au corps mort, qu’il soit entier, fragmenté voire embryonnaire.
Nous souhaiterions à cet égard faire entendre des contributions qui examinent les différents régimes de valeur assignés au corps mort : depuis la chose sacrée (lorsque le corps mort ou ses fragments sont par exemple considérés comme des reliques, des biens patrimoniaux inaliénables ou encore des appuis rituels de processus de deuil), jusqu’au déchet (lorsque les cadavres ou leurs parties sont considérés comme des rebuts ou des pièces anatomiques), en passant par le cadavre en tant qu’objet d’étude scientifique ou entendu comme une marchandise lorsqu’il devient un trophée ou qu’il fait l’objet d’une transaction commerciale.
Nombreux sont ceux qui se sont déjà intéressés aux différents processus (synchroniques et diachroniques) de qualification ou de disqualification des restes humains, pour notre part nous appelons des contributions qui restituent les trajectoires empruntées par les cadavres, en portant une attention singulière aux éventuels traitements différenciés dont font l’objet certaines de leurs parties, et qui permettraient de forger une typologie de la présence au monde des corps morts.

3 - Fantasmes et attitudes
Mais le cadavre fait l’objet d’usage et de modalités d’appropriation qui ne sont pas exclusivement d’ordre matériel. Les images du cadavre (photographies, films, dessins, imagerie médicale) ont suscité autant de travaux que d’interrogations notamment sur leurs mésusages et sur leurs portées éventuellement transgressives, comme sur le voyeurisme, ce « cannibalisme de l’oeil », auquel elles peuvent donner naissance.
Nous souhaiterions recevoir des contributions portant sur les différents pouvoirs ou attributs symboliques conférés aux corps morts dématérialisés (fantômes, spectres, zombies, ancêtres) que ceux-ci soient envisagés du point de vue de la nuisance ou de la bienfaisance ; ces contributions pourraient prendre appui sur des études de textes littéraire, d’oeuvres cinématographiques ou artistiques restituant des régimes fictionnels d’existences du corps mort.

Les propositions de communications orales (d’une durée de 30 minutes) devront comporter :
- un titre,
- un résumé d’une à deux pages,
- une courte biographie de l’auteur et ses coordonnées complètes
Elles devront être adressées par mail avant le 15 janvier 2020 aux organisateurs de la manifestation à l’adresse : atelier.mort@gmail.com

La sélection des contributions sera communiquée à partir du 15 mars 2020.
Un texte abouti d’un volume maximum de 40 000 signes (espaces et bibliographie compris) sera demandé à l’issue de la manifestation pour insertion dans une publication collective.
Comité d’organisation
Anstett Elisabeth (CNRS, UMR 7268 ADES)
Brown Nathalie (Ministère de l'éducation nationale, UMR 7268 ADES)
Richier Anne (INRAP, UMR 7268 ADES)
Schmitt Aurore (CNRS, UMR 7268 ADES)
Comité scientifique
Bonnabel Lola (DRAC SRA PACA, Aix-en-Provence, UMR 8215 Trajectoires)
Carol Anne (AMU, UMR 7303 Telemme, Aix-en-Provence)
Clavandier Gaëlle (Université Jean Monnet, Saint-Etienne, UMR 5283 Centre Max Weber, Lyon)
Moisseeff Marika (CNRS, UMR 7130 Laboratoire d’Anthropologie sociale, Paris)
Tzortzis Stéfan (DRAC SRA PACA, Aix-en-Provence, UMR 7268 ADES)

1 Selon les termes très justement employés lors des débats restitués par l’ouvrage Louis-Vincent
Thomas, passeur de frontières, 2018.

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