jeudi 16 mai 2019

Cent ans de sous-reconnaissance des maladies professionnelles

Cent ans de sous-reconnaissance des maladies professionnelles (1919-2019)


Colloque 


Amphithéâtre Simone Veil, Sciences Po
28 rue des Saints-Pères 
Paris, France (75007) 

Mercredi 19 et jeudi 20 juin 2019



La loi du 25 octobre 1919 instaure en France le droit à la réparation forfaitaire des maladies professionnelles. Elle étend le « deal en béton »1 établi par la loi de 1898 sur l’indemnisation des accidents du travail à de nouveaux maux affectant les corps ouvriers : en contrepartie de leur immunité civile, les employeurs acceptent l’automaticité d’une indemnisation forfaitaire des salariés lésés. Ceux-ci bénéficient d’une présomption d’imputabilité au travail des maladies réglementairement définies comme « professionnelles », leur épargnant la charge de la preuve. Un système de « tableaux » précise la liste des pathologies indemnisables et les conditions administratives à remplir pour avoir droit à la reconnaissance d’une maladie professionnelle. 

Jamais ce compromis n’a totalement satisfait les parties, du fait notamment de l’impuissance à obtenir l’interdiction de l’usage des poisons pour les salariés, et des réticences des employeurs à reconnaître de nouvelles maladies. Cent ans après l’adoption de la loi de 1919, la sous-reconnaissance des maladies professionnelles reste patente, comme l’illustre le cas des cancers. Plus de deux millions de salariés français sont exposés à des produits cancérogènes sur leur lieu de travail, et on estime que 4 à 8% des cancers survenant chaque année en France sont imputables à ces expositions, soit 14 000 à 30 000 cas. Pourtant, moins de 2 000 cancers professionnels sont reconnus chaque année, dans leur très grande majorité (plus de 80%) en lien avec une exposition à l’amiante. Cette situation a maintes fois été pointée par des rapports publics, et s’est même institutionnalisée depuis deux décennies à travers le versement d’une compensation financière par la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) à la branche maladie de la sécurité sociale. Malgré cette prise en compte formelle d’une sous-reconnaissance de l’origine professionnelle de nombreuses maladies chroniques, les principes fixés en France pour la reconnaissance des maladies professionnelles n’ont évolué qu’à la marge en un siècle. 

Ce colloque se donne pour but de tirer les enseignements d’un siècle de sous- reconnaissance des maladies du travail. Il invite pour cela des chercheurs en sciences sociales français et étrangers, ainsi que des acteurs des politiques publiques de prise en charge des maladies professionnelles. Ces regards croisés éclaireront l’histoire de la prise en charge sociale des maladies du travail, ainsi que les débats contemporains qui entourent leur reconnaissance, alors que deux rapports parlementaires récents tentent de donner une nouvelle actualité à ces questions.




Mercredi 19 juin 2019

9h Accueil

9h15 Introduction de la journée

9h30 - 13h Le moment 1919 : la reconnaissance des maladies professionnelles et ses limites
Discutante : Anne Rasmussen (Centre Alexandre Koyré)

Judith Rainhorn (Professeure d’histoire, Université Paris 1, CHS) : En quoi le tableau n°1 sur le saturnisme est-il la matrice de la (sous-) reconnaissance des maladies professionnelles ?

Anne Marchand (Postdoctorante au Giscop 93, Université Paris 13, associée à l’IDHES/Evry) : La catégorie « cancer professionnel »: une construction conflictuelle. Un éclairage par les archives de la commission des maladies professionnelles

Éric Geerkens (Professeur d’histoire, Université de Liège) : Le Fonds de prévoyance en faveur des victimes des maladies professionnelles ou la réparation amputée des maladies professionnelles (Belgique, 1927-1963)

Paul-André Rosental (Professeur d’histoire, Sciences Po, Centre d’histoire) :  Reconnaître la silicose : un problème sisyphien

14h - 17h30 Les frontières des maladies professionnelles
Discutant : Nicolas Hatzfeld (IDHES, Evry)

Ada Avila Asunçao (Professeure de Santé Publique, Faculté de Médecine, Université Fédérale de Minas Gerais, Brésil) et Emmanuel Henry (Professeur de sociologie, Université Paris-Dauphine IRISSO) : Connaissances et ignorances scientifiques dans l’établissement des listes de maladies professionnelles indemnisables. Une comparaison sud-américaine

Catherine Cavalin (Chargée de Recherche en sociologie, CNRS, Université Paris-Dauphine IRISSO) :(Ré-)émergence des maladies de la silice cristalline : silicoses aiguës et maladies auto-immunes des travailleurs de la pierre artificielle, à l’heure de nouvelles réglementations sur la silice 

Marie Ghis Malfilatre (Postdoctorante en sociologie, INSERM) :Usages, arènes, enjeux autour du tableau n°6 sur les rayonnements ionisants

Rémy Ponge (Docteur en sociologie, chargé d’étude au Giscop 84, chercheur associé au PRINTEMPS et au LEST) : Connaissances scientifiques et inaction publique : l’impossible reconnaissance de la santé mentale en maladie professionnelle

Jeudi 20 juin 2019

9h30 - 13h Usages et mésusages des catégories juridico-administratives
Discutant : Pascal Marichalar (IRIS)

Alfredo Menéndez-Navarro (Professeur d’Histoire des sciences, Université de Grenade, Espagne) : The under-recognition of asbestos-related diseases in Spain, 1962-2011

Jean-Noël Jouzel et Sylvain Brunier (Chargés de Recherche CNRS, CSO), Giovanni Prete(Maître de Conférence, Université Paris 13, IRIS) : La médecine hospitalière et la reconnaissance des maladies professionnelles : le cas des hémopathies

Delphine Serre (Professeure de sociologie, Université Paris Descartes, CERLIS) : Les acteurs aux prises avec la reconnaissance des maladies professionnelles dans les tribunaux : logiques profanes versus stratégies juridiques 

Marion Gaboriau (Doctorante en sociologie, CSO) : De la fabrication de la preuve à la décision. Reconnaissance, droit et usage de la maladie professionnelle dans la Fonction Publique Territoriale. 

14h - 16h30 Table ronde : les enjeux des transformations actuelles
Animateurs : Emmanuel Henry (IRISSO) et Jérôme Pélisse (CSO)

Isabelle Baldi (Epidémiologiste, Maîtresse de Conférence à l’Université de Bordeaux)

Henri Bastos (Adjoint au directeur de l’évaluation des risques, ANSES)

Eric Beynel (Porte-parole de l’Union syndicale Solidaires, sous réserve)

Roland Masse (Ancien président de la Commission Maladie Professionnelle du COCT)

Marie Pascual (Médecin du travail, membre de l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante, ANDEVA)


Inscriptions
Information et inscription sur : www.cso.edu ou www.irisso.dauphine.fr

Comité scientifique
Sylvain Brunier (CSO),
Catherine Cavalin (IRISSO),
Emmanuel Henry (IRISSO),
Jean-Noël Jouzel (CSO),
Jérôme Pélisse (CSO)

Coordinateurs
Emmanuel Henry (IRISSO) et Jérôme Pélisse (CSO, membre du comité scientifique du CHATEFP)

Ce colloque est organisé avec le soutien du CSO, de l’IRISSO, du CHATEFP et du programme RegulRisk financé par PSL (ANR-10-IDEX-0001-02).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire