La maladie d’Alzheimer et la recherche biomédicale. Analyses des sciences humaines et sociales
Appel à communications
Organisation : Laboratoire de Recherches en Éthique et en Épistémologie (R2E)/CESP (U.Paris-Saclay/INSERM), LabEx DistAlz, Espace éthique Ile-de-France
Ces dernières années, de nouveaux traitements contre la maladie d’Alzheimer ont obtenu – au moins provisoirement – une autorisation de mise sur le marché (AMM). Leur efficacité et sécurité d’emploi n’en ont pas pour autant été exempts de controverses. Celles-ci ont notamment porté sur la qualité des jeux de données présentés aux agences réglementaires, sur les risques et sur les (in)cohérences des faits biologiques et cliniques observés. S’il ne fait aucun doute que ces nouveaux traitements permettent d’éliminer les lésions affectant la communication neuronale, il n’est pas encore certain que cette action biologique permette d’inverser, d’arrêter ou même de ralentir de manière significative le déclin cognitif dont souffrent les patients. Les futurs essais devront alors démontrer que l’efficacité des traitements est cliniquement pertinente et supérieure aux effets indésirables identifiés (hémorragies et œdèmes cérébraux).
Ces débats ont permis d’interroger la légitimité de l’hypothèse de la cascade amyloïde comme standard de recherche clinique. Pour certains, les résultats des derniers essais thérapeutiques confirment la validité de la « piste amyloïde » et encouragent chercheurs et cliniciens à inclure encore plus tôt les patients dans des protocoles de recherche afin d’améliorer l’effet thérapeutique des traitements. Pour d’autres, ces résultats tendent davantage à être perçus comme mitigés, voire comme un énième échec des agents anti-amyloïdes.
Pour les sciences humaines et sociales, la recherche biomédicale consacrée à la maladie d’Alzheimer, avec ses impasses et ses promesses, constitue un terrain privilégié pour interroger à nouveaux frais les cadres éthiques, épistémiques et institutionnels qui déterminent les orientations des savoirs biomédicaux.
Ce colloque international est l’occasion de croiser les regards des disciplines issues des sciences humaines et sociales et de réfléchir à la nature des enjeux auxquels sont confrontés les acteurs impliqués, de près ou de loin, dans la recherche biomédicale sur la maladie d’Alzheimer.
Les communications pourront s’intéresser à l’expérience des patients inclus dans des essais, à la mobilisation des associations de patients, au travail des agences réglementaires, aux stratégies marketing de l’industrie pharmaceutique, aux activités de recherche translationnelle, aux différentes façons d’aborder les causes de la maladie et d’y associer des solutions diagnostiques et thérapeutiques, à la plasticité des données d’essais cliniques et à la redéfinition biologique des critères diagnostiques de la maladie, etc. À partir de ces objets empiriques, loin d’être exhaustifs, il s’agira alors d’interroger plus spécifiquement l’acceptabilité sociale du diagnostic précoce et des essais de prévention, l’usage non plus seulement probatoire de ces essais mais aussi exploratoire dans le sens où ils permettent certes d’apporter une réponse sur l’efficacité d’une thérapeutique mais aussi de produire de nouveaux savoirs biologiques sur le développement d’une maladie. Cette hétérogénéité d’objets permet également d’interroger l’autonomie relative des régulateurs et la logique des raisonnements qui ont conduit les agences européennes et états-uniennes à des décisions différentes en matière d’AMM. Les tensions épistémiques qui confrontent l’emprise du paradigme de la cascade amyloïde à des hypothèses plus hétérodoxes, ou encore la façon dont la recherche sur la maladie d’Alzheimer reconfigure les frontières entre le soin et la recherche, la santé et la maladie, la biologie et la clinique, constituent aussi de possibles pistes de réflexion.
Autant d’acteurs, d’objets et de problématiques qui feront de ce colloque international un événement indispensable pour comprendre la complexité des enjeux qui structurent la recherche d’un traitement contre la maladie d’Alzheimer.
Les contributions, sous forme de résumés d'environ 300 mots en français ou en anglais, seront envoyées par email à : vincent.israel-jost@universite-paris-saclay.fr avant le 15 décembre.
Les notifications d'acceptation seront envoyées pour le 15 janvier 2024.
Alzheimer's Disease and Biomedical Research. Analysis from the Humanities and Social Sciences.
Call for papers
Organized by : Laboratoire de Recherches en Éthique et en Épistémologie (R2E)/CESP (U.Paris-Saclay/INSERM), LabEx DistAlz, Espace éthique Ile-de-France
Language : French and English
In recent years, new treatments for Alzheimer's disease have obtained, at least temporarily, marketing authorization. However, their effectiveness and safety have not been without controversies. These controversies have mainly revolved around the quality of the data presented to regulatory agencies, the risks involved, and the (in)consistencies of the biological and clinical facts observed. While there is no doubt that these new treatments can eliminate lesions affecting neuronal communication, it is not yet certain whether this biological action can effectively reverse, stop, or significantly slow down the cognitive decline experienced by patients. Future trials will need to demonstrate that the treatments' efficacy is clinically relevant and superior to the identified side effects (brain hemorrhages and edemas).
These debates have led to questioning the legitimacy of the amyloid cascade hypothesis as a standard for clinical research. For some, the results of recent therapeutic trials do confirm the validity of this hypothesis and encourage researchers and clinicians to involve patients even earlier in research protocols to improve the therapeutic effect of treatments. However, for others, these results are seen as more mixed, or even as another failure of anti-amyloid agents.
For the humanities and social sciences, biomedical research dedicated to Alzheimer's disease, with its deadlocks and promises, provides a privileged field to question the ethical, epistemic, and institutional frameworks that determine the orientations of biomedical knowledge.
This international symposium offers an opportunity to bring together perspectives from disciplines in the humanities and social sciences and reflect on the nature of the challenges faced by the actors involved, directly or indirectly, in biomedical research on Alzheimer's disease.
Presentations could focus on the experiences of patients included in trials, the mobilization of patient associations, the work of regulatory agencies, marketing strategies of the pharmaceutical industry, translational research activities, different ways of approaching the causes of the disease and associating diagnostic and therapeutic solutions, the flexibility of clinical trial data, and the biological redefinition of the disease's diagnosis criteria, among other topics. Starting from these empirical objects, far from being exhaustive, the aim will be to specifically examine the social acceptability of early diagnosis and prevention trials, not only as probative but also as exploratory in the sense that they not only provide answers regarding therapeutic efficacy but also generate new biological knowledge about disease development. This heterogeneity of objects also allows for questioning the relative autonomy of regulators and the logic of reasoning that led European and American agencies to different marketing authorization decisions. The epistemic tensions that confront the dominance of the amyloid cascade paradigm with more heterodox hypotheses, or how research on Alzheimer's disease reshapes the boundaries between care and research, health and illness, biology and clinical practice, are also potential avenues for reflection.
With so many actors, objects, and issues involved, this international symposium will be an essential event for understanding the complexity of the challenges that shape the search for a treatment for Alzheimer's disease.
Contributions, in the form of a summary of approximately 300 words (French or English), should be sent by email to: vincent.israel-jost@universite-paris-saclay.fr before December 15th. Acceptance notifications will be sent out by January 15, 2024.
Vincent Israel-Jost (R2E, Paris-Saclay, INSERM) au nom du comité d'organisation :
Amélie Petit (R2E, Paris-Saclay, INSERM), Léo Coutellec (R2E, Paris-Saclay, INSERM), Paul-Loup Weil-Dubuc (Espace éthique Ile-de-France) & Fabrice Gzil (Espace éthique Ile-de-France)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire