Appel à communications
Numéro spécial de la revue Gustave Flaubert ITEM/CNRS
Envoi des propositions : 15 janvier 2014
Remise des textes : avril 2014
Dès 1837, Une leçon d’histoire naturelle. Genre commis
manifeste l’intérêt de Flaubert pour les sciences de la nature, et il
cite Pline et Cuvier. Sans doute est-il déjà sensible à la mode des
Physiologies qui se multiplient dans les années 1830, d’autant plus que
Balzac avait lui-même pratiqué ce genre. Toutefois, dans la réflexion et
l’œuvre de Flaubert la grande période des sciences de la nature débute
plus tard. Dans les derniers chapitres de L’Éducation sentimentale de
1845 se forme un idéal d’impersonnalité et d’indépendance par rapport
aux préjugés dont les sciences naturelles semblent alors fournir le
modèle : « La science ne reconnaît pas de monstre, elle ne maudit aucune
créature, et elle étudie avec autant d’amour les vertèbres du serpent
boa et les miasmes des volcans que le larynx des rossignols et que la
corolle des roses. » Dans les réflexions esthétiques de la
Correspondance des années 1850, Flaubert cite Cuvier, Geoffroy
Saint-Hilaire, Buffon tandis qu’il rédige Madame Bovary en
relisant du Balzac, et en réfléchissant sur ce que doit être désormais
le roman moderne et la prose. Ce sont aussi des années d’intenses
discussions et de collaboration croisée avec Louis Bouilhet qui écrit
son grand poème « Les Fossiles » (1854). Non seulement Flaubert a fait
tout au long de sa vie de nombreuses lectures dans le domaine des
sciences de la nature (plus nombreuses encore dans la période de Bouvard et Pécuchet)
– lectures dont on trouve les traces dans la Correspondance, dans les
Carnets de travail, les dossiers documentaires, et les manuscrits des
œuvres –, mais il rencontre aussi de nombreux scientifiques. Sa famille
est liée à la famille Pouchet, dont le père est le fondateur du Muséum
d’histoire naturelle de Rouen et l’adversaire de Pasteur, et le fils,
naturaliste également, l’informateur de Flaubert (et de Zola) sur les
questions qui touchent aux sciences de la nature et de la vie. À partir
de 1862, il fréquente aux dîners Magny Berthelot (intéressé par la
biochimie), Claude Bernard, Renan.
Les sciences naturelles sont impliquées dans l’évolution esthétique
de Flaubert, dans sa formation intellectuelle, et dans la rédaction des
œuvres soit parce qu’elles fournissent des représentations, des
interrogations, ou une perspective épistémologique qui oriente la
structuration de la fiction. Garantes jusqu’à un certain point d’une
nouvelle méthode de travail et d’observation, de la réinvention d’une
forme romanesque après Balzac (dont l’œuvre trop idéologique agace
parfois Flaubert), et contre un certain romantisme, les sciences de la
nature et de la vie donnent aussi accès à un imaginaire du savoir qui
fascine Flaubert et dans lequel s’alimentent ses fictions, ce qui ne
l’empêche pas par ailleurs d’ironiser sur le scientisme, et de
déconstruire dans La Tentation de 1874 ou Bouvard et Pécuchet
certains savoirs naturalistes lorsqu’ils sont utilisés comme des
croyances. Ce numéro de la revue Flaubert de l’ITEM rendra compte de
l’ambiguïté du recours aux sciences naturelles qui alimentent parfois le
rêve, l’hallucination et contribuent à l’élaboration de représentations
étranges voire fantastiques. Ambiguïté aussi parce que les savoirs
utilisés sont éventuellement des savoirs archaïques, en décalage avec la
science de l’époque, ou inversement parce que les représentations
élaborées dans une fiction située dans le passé (l’antiquité par
exemple) et à partir d’images et d’idées anciennes peuvent être
infléchies vers des questionnements modernes.
Ce numéro sur les sciences de la nature et de la vie dans la
réflexion, le travail et l’œuvre de Flaubert regroupera des
contributions qui permettront de mieux connaître le contexte
épistémologique dans lequel Flaubert travaillait (et son entourage
scientifique), ses lectures, l’impact esthétique et épistémologique des
savoirs utilisés, leur retraitement fictionnel dans les manuscrits, la
présence implicite ou explicite des savoirs dans les textes, ce qui
motive leur utilisation, les effets produits. Les articles pourront
aborder la mise en texte des savoirs naturalistes soit d’un point de vue
esthétique, ou épistémologique, voire idéologique et religieux.
Coordinatrice du numéro : Gisèle Séginger – gisele.seginger@univ-mlv.fr
Professeur à l’université Paris-Est Marne-la-Vallée
Responsable du programme « Littérature et savoirs du vivant – XIXe et XXe siècle »
à la Fondation Maison des sciences de l’homme de Paris
Chercheur associé à l’ITEM (équipe Flaubert)
Professeur à l’université Paris-Est Marne-la-Vallée
Responsable du programme « Littérature et savoirs du vivant – XIXe et XXe siècle »
à la Fondation Maison des sciences de l’homme de Paris
Chercheur associé à l’ITEM (équipe Flaubert)
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